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01 octobre 2016

MAINTENIR NOTRE RANG

Un siège au Conseil de sécurité de l’ONU, une force autonome de dissuasion et un outil militaire qui lui offre une liberté d’appréciation, de décision et d’action unique en Europe, la France a tous les attributs d’un pays souverain et les ingénieurs de l’armement ne sont pas étrangers à cette situation.


Ces positions chèrement acquises sont le résultat de centaines de milliards d’euros d’investissement et plus de 70 ans d’une volonté politique qui ne fait guère débat et repose sur une maîtrise d’ouvrage étatique efficace ainsi qu’une industrie performante.

Le maintien de nos capacités est en soi un combat, dans un environnement bien plus contraint qu’à l’âge d’or des trente glorieuses et de ses réalisations emblématiques en de si nombreux domaines. Car sans vouloir verser dans la nostalgie, les difficultés s’accumulent. L’émergence d’ambitions souveraines dans de nombreux pays, portés par une économie dynamique et une volonté légitime de progrès, accroît la pression sur de nombreux secteurs d’excellence quand elle ne met pas à mal certains d’entre eux, essentiels : énergie, microélectronique ou encore télécommunications…

Des réglementations européennes et nationales plus nombreuses donnent lieu au développement d’une intense activité de régulation et de contrôle. Celle-ci pèse sur une industrie en rétrécissement et accapare incidemment une partie non nulle des ressources des corps techniques de l’État, affectées autrefois à des tâches plus directement productives.

A tout le moins, mieux vaut comprendre toutes les conséquences des normes que l’on fait siennes… D’autant que le droit coutumier anglo-saxon, grand producteur de normes lui aussi, a des effets bien différents du nôtre : affirmation par les américains du caractère extraterritorial de leur droit, développement du soft power, rôle parfois ambigu des ONG, pouvoir croissant des lobbies. Mis au service de l’industrie ou des services financiers, le droit et l’influence peuvent devenir des armes redoutables.

Les facteurs de contrainte externe se multiplient et la France a parfois du mal   à défendre ses intérêts, comme en témoigne le nombre de rapports sur son influence en diminution et les moyens de la restaurer. Nous n’avons pas réussi à faire de l’Union européenne un instrument au service de notre rêve bien français de supériorité politique. Il nous faut opérer un grand retour à l’étranger, qu’il soit proche (Bruxelles) ou loin (grand export) et ne pas se replier sur notre pré carré. Oui, mais pratiquement ? En commençant par mieux parler anglais ?

Les facteurs sociétaux et démographiques, auxquels nous sommes moins sensibles, ont aussi toute leur importance. Le vieillissement de la population, s’il est mal géré, peut accroître la part des transferts sociaux au détriment des investissements de l’État, qui stagnent à moins de 8 % de la dépense publique depuis des années. La persistance du chômage et de « ghettos urbains » selon une expression reprise par le Premier ministre, sont des sources d’instabilité politique.

La variété des articles qui suivent témoigne de l’intérêt que nous portons au maintien du rang de notre pays, dans les domaines politique, linguistique, militaire, économique, industriel et technologique. Au-delà de la nécessaire défense de nos intérêts, il nous revient, ainsi qu’aux ingénieurs des autres corps techniques de l’État, d’éclairer le pouvoir politique sur les technologies d’avenir ou de rupture et leurs potentialités pour en assurer le développement. Notre proximité avec l’industrie et les hautes technologies nous autorise cette ambition.

 

    
Richard Finck, ICA, Sous-directeur de la non-prolifération, des sciences et des technologies au SGDSN
Chef du service des biens à double usage (ministère chargé de l’industrie) de 2012 à 2015. Directeur de cabinet du Commissaire à la diversité et à l’égalité des chances (services du Premier ministre) de 2008 à 2012. Conseiller technique au cabinet du Ministre de la santé et des solidarités (2006-2007).
 

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