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31 mai 2018

LE SERVICE INDUSTRIEL DE L’AÉRONAUTIQUE (SIAÉ)
UN OUTIL INDUSTRIEL ÉTATIQUE AU CŒUR DE LA TRANSFORMATION DU MCO AÉRONAUTIQUE

Outil d’autonomie étatique, le SIAé est aujourd’hui entré dans sa dixième année d’existence. Focus sur un acteur essentiel du MCO aéronautique militaire, centré sur la performance industrielle et économique, dans une démarche de transformation permanente.


Rattaché au chef d’état-major de l’Armée de l’air, fort d’une structure unique au sein de l’État centrée sur une organisation en compte de commerce, le SIAé compte aujourd’hui environ 4700 agents. Le SIAé réalise la maintenance de niveau industriel d’aéronefs (avions et hélicoptères), moteurs, équipements et radars sols militaires majoritairement au profit de clients étatiques mais aussi privés. Le SIAé conçoit et produit également des systèmes sols et embarqués, ainsi que des radômes pour avions d’armes. Cela représente un chiffre d’affaire annuel total de 700 millions d’euros.

Les Ateliers Industriels de l’Aéronautique (AIA) constituent le socle de la production industrielle du SIAé. Ils sont aujourd’hui au nombre de cinq : Bordeaux, Clermont-Ferrand, Cuers-Pierrefeu, Ambérieu et Bretagne. Ils sont le fruit d’une volonté d’indépendance de l’État dans la maîtrise de son outil de défense, dans un domaine, l’aéronautique, relativement jeune, mais où les enjeux de supériorité opérationnelle et technologique sont permanents.

Une adaptation permanente des modes de production

L’outil industriel du SIAé n’a cessé d’adapter ses modes de production pour garantir l’efficacité de sa mission, qui est de délivrer de la disponibilité et du potentiel aux matériels qui lui sont confiés. Cette mission s’accompagne d’un volet économique majeur, dans un objectif de soutenabilité du modèle. La maîtrise des coûts passe notamment par la performance et la réalisation de gains de maintenance, dont le SIAé doit rendre compte annuellement aux autorités de son conseil de surveillance, coprésidé par le CEMA et le DGA. Le SIAé est un acteur de la bataille du coût, de l’efficacité et de l’efficience du MCO aéronautique.

Fabrications additives pour simulateur

Les adaptations notables des modes de production sont de plusieurs natures. Dans le cas du Transall, dans une logique d’exploitation des avancées du monde aéronautique civil, la fin des années 60 a marqué le changement d’approche, des visites dites « révision générale » (ou remise à neuf) à une organisation centrée sur l’analyse de l’endommagement de l’aéronef. Cette méthode (approche IRAN « Inspect and Repair As Necessary ») importée des Etats-Unis permettait alors de décider de façon ciblée les travaux nécessaires de réparation à mener et les tolérances applicables. En outre, une logique d’innovation organisationnelle a été menée dès la mise en service du Transall : une cellule rapprochant le niveau industriel et le niveau utilisateur a été créée à Clermont-Ferrand pour l’entrée en service de l’aéronef. La CIMT (Cellule Industrielle de Maintenance Transall) est créée le 7 juillet 1969 : sous la responsabilité du directeur de l’AIA de Clermont-Ferrand, elle est chargée de définir et de faire évoluer la maintenance du nouvel avion à tous les niveaux techniques d'intervention (NTI).

Les moteurs vont bénéficier à Bordeaux à partir des années 70 des développements industriels technologiques liés à l’essor des machines-outils à commande numérique et de l’informatisation de la documentation technique. En outre, des investissements majeurs sont réalisés dans le domaine du traitement thermique et chimique des pièces, la soudure par bombardement électronique ainsi que la métrologie de haute précision. Le défi économique relevé par l’AIA de Bordeaux a consisté à développer une capacité d’adapter les méthodes de maintenance à la conception modulaire des moteurs, et à développer des solutions de réparation d’éléments critiques tels que des aubes de turbine dont le remplacement à neuf s’avère d’un coût plus élevé de plusieurs ordres de grandeur. Les solutions technologiques dont les moteur ATAR et M53 du Mirage 2000 vont bénéficier dans les années 90 s'appuient sur des techniques dites de rechargement plasma, associées à des moyens de métrologie à rayons X. Aujourd’hui, ce modèle éprouvé démontre des gains économiques annuels conséquents pour le client sur la seule activité moteur. Comme pour le Transall, une structure nommée CICOMORE, regroupant l’ensemble des acteurs étatiques et industriels partie prenante de la maintenance des moteurs par l’AIA de Bordeaux, assure la performance technique et la proximité permanente avec les utilisateurs.

 

 

La réactivité du SIAé

 

La Marine dispose d’une flotte de trois avions américains de guet aérien E2C « Hawkeye » qui œuvrent en particulier depuis le porte-avion Charles de Gaulle. Disposant de privilèges comparables à ceux du constructeur américain, le SIAé assure la gestion technique complète de l’avion au profit des Forces. En février 2018, en phase d’atterrissage final, un E2C éclate un pneumatique, dont les débris viennent perforer en plusieurs endroits la cellule, arrachant au passage bon nombre de câbles électriques. Plus de peur que de mal, l’aéronef est arrêté : toutefois, il doit rejoindre à court terme les États- Unis pour un exercice opérationnel d’importance. Le bureau d’étude de Cuers met au point la solution de réparation. Quelques jours après, au beau milieu des vacances scolaires, les personnels des AIA de Cuers et Bretagne (L’E2C est stationné en flottille à Lann-Bihoué) s’affairent sur l’aéronef. Un mois après l’incident, l’aéronef est à nouveau disponible, sa mission aux États-Unis n’est plus compromise. A titre d’anecdote, à quelques jours d’intervalle, ce sont en fait deux aéronefs qui se sont retrouvés bloqués : en effet, un autre E2C s’est vu foudroyé en vol à la même période. Le troisième et dernier aéronef de la flotte étant en maintenance à Cuers, la flotte était donc « au tapis ». Le SIAé est en réalité intervenu sur deux aéronefs en ce début d’année 2018 afin de redonner la disponibilité totale dans un délai très court.

 

 

Réparation perforation cellule E2C

Réparation additive laser d'impact

La maintenance aéronautique est un domaine de transformation permanente. Comment se situe le SIAé dans un cadre de concept d’industrie 4.0, qui entre autres choses modélise un rapprochement fort entre le client et le fournisseur, implique une connexion en réseau de l’entreprise et propose des modes de production flexibles et reconfigurables, capables de fournir des produits personnalisés et compétitifs ?

La fabrication additive (ou impression 3D) fait partie des techniques en rupture que le SIAé développe depuis sept ans environ avec la DGA et les partenaires industriels. Cette technique est d’ores et déjà utilisée dans le domaine des plastiques et polymères pour le prototypage et la réalisation d’outillage sur mesure. A Cuers, à des fins de réalisme, un certain nombre d’éléments d’un simulateur de vol développé au profit de l’École de l’Air sont « imprimés » par ce procédé.

L’enjeu de la maîtrise de l’impression 3D dans le domaine des matériaux métalliques à l’AIA de Bordeaux se situe aujourd’hui dans la continuité de 30 années de recherche des gains économiques favorisant la réparation. Ce sont aujourd’hui des techniques innovantes de réparation additive au laser de pièces critiques du moteur du Rafale qui sont au cœur des développements.

Réalité augmentée au Fab Lab du SIAé

L’activité industrielle du SIAé et les innovations technologiques s’appuient sur une population pluridisciplinaire au large spectre de compétences. Cette ressource très riche doit se voir ouvrir un maximum d’opportunités stimulant l’innovation au profit de la performance. A l’instar du monde civil, le SIAé expérimente depuis deux ans un FAB-LAB, lieu ouvert à l’ensemble des employés désireux d’expérimenter concepts et techniques au profit de la performance industrielle.

Au-delà des moyens de production, le SIAé a réussi en janvier 2018 la phase d’intégration de l’ensemble de son activité au sein d’un seul système d’information d’entreprise intégré. Ceci constitue un jalon majeur pour piloter la performance de la réalisation de prestations globales de maintenance, et proposer des marchés globaux de maintenance compétitifs, répondant ainsi aux exigences voulues par la ministre des Armées dans le cadre de la réforme du MCO aéronautique : disposer de prestataires uniques garantissant la disponibilité opérationnelle des matériels pour les Forces.

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