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01 février 2017

SE PROTÉGER DU RISQUE NRBC

Face aux dangers nucléaires, radiologiques, biologiques ou chimiques, tous les soldats doivent être protégés. L’opération d’armement relative au futur système de protection individuelle fait appel à l’ingénierie système pour mieux maitriser la complexité. 


Après la « guerre des gaz » de la première guerre mondiale (dont l’offensive au gaz par l’artillerie allemande sur le chemin des dames en 1917, pendant 16h d’affilée, fut l’un des événements marquants), la menace chimique connait à nouveau un pic de notoriété suite à une série d’événements sur certains théâtres d’opérations.
Ces évènements s’éloignent aujourd’hui du modèle envisagé depuis la guerre froide, qui consistait plutôt à se protéger contre une attaque massive mais courte et à continuer la mission en se protégeant sur une durée relativement limitée.
Le contexte opérationnel évolue : menace chimique désormais diversifiée, nécessité de prolonger le combat en ambiance NRBC, nouveaux théâtres d’opération, notamment urbains. Une réflexion globale s’impose donc à présent, sur les moyens de défense biologique et chimique, mais aussi par cohérence nucléaire et radiologique, la manière de les projeter et de les utiliser.

Assurer la cohérence
Un schéma directeur pour doter les forces d’un système intégré de défense NRBC a été rédigé par l’état-major des armées en 2012. La défense NRBC repose sur les cinq piliers suivants :
- le commandement et la gestion de l’information NRBC,
- la détection, l’identification et la surveillance,
- la protection, - la gestion des risques et la décontamination,
- les contre-mesures médicales.
Chaque pilier doit être porté à un niveau de performance suffisant pour conférer à l’ensemble du système de défense NRBC sa crédibilité et sa cohérence.
La mise en place par l’état-major des armées et la direction générale de l’armement d’un comité de pilotage dit SAFIR NRBC (système anticipatif des forces intégré et réactif de défense NRBC) a pour but de répondre à ce schéma directeur et d’assurer la cohérence et la continuité des actions qui vont de l’expression du besoin au retrait du service des équipements. Il s’agit d’assurer :
- La cohérence dans le dialogue entre les multiples acteurs.
- La cohérence des opérations et de leur conduite. C’est une nécessité car la défense NRBC est une fonction transverse, c’est-à-dire qu’elle intègre des équipements NRBC dans des systèmes d’armes divers (navire, véhicule…). Elle est également interarmées.
- La cohérence du système opérationnel. La nécessité de développer un système intégré de la défense NRBC et la densité des réseaux d’acteurs qu’il sollicite, imposent une démarche d’ingénierie système globale.


Tenue TOM avec masque ANP

 

Se protéger en opérations
Essentielle au sein de ce schéma, la protection est de deux types : la protection collective qui garantit aux personnels une zone non-contaminée pour pouvoir travailler sans les contraintes ergonomiques de la protection individuelle, et la protection individuelle du soldat.

L’équipement de protection individuelle NRBC doit garantir l’intégrité physique du porteur en protégeant les voies respiratoires, digestives, les yeux et la peau contre les agents de guerre utilisés sous forme vapeur, liquide et aérosol mais aussi les TICs (Toxique Industriel Chimique), et doit donc permettre de faire face à toute menace NRBC accidentelle ou provoquée.
Il doit permettre au porteur de conduire les missions envisagées dans la totalité des scénarios opérationnels d’emploi NRBC sous divers climats.

L’équipement actuellement en dotation est constitué de sous-ensembles conçus à des périodes différentes et indépendamment les uns des autres :
- un masque de protection des voies respiratoires et digestives et des yeux : ANP/VP (appareil normal de protection à visière panoramique) pour l’armée de terre, A3P (appareil de protection à port permanent) pour la marine nationale et ARFA (appareil respiratoire filtrant des armées) pour l’armée de l’air ; - une tenue de protection respirante qui est la tenue TTA (tenue toutes armes) ou TOM (tenue outre-mer) pour un emploi général, et la T3P (tenue de protection à port permanent) dotée d’une propriété ignifuge pour des emplois spécifi ques (pilote d’hélicoptère et pilote de char) ;
- des gants et des chaussettes NRBC pour la protection des extrémités, adaptés suivant la fonction du porteur (fantassin, pilote).


Une protection intégrale du combattant avec le système EPIA

Une approche Système
Le futur équipement de protection individuelle nommé EPIA (Ensemble de Protection Individuelle NRBC des Armées) sera réalisé selon une approche système, prenant en compte la globalité de la protection du corps de façon à optimiser tous les éléments d’interface pour garantir la continuité de la protection. Il devra également être compatible avec les autres équipements individuels non NRBC (armement, équipements FELIN…) ou en environnement proche (ordinateur, tablette, volant,…) du porteur, sans le gêner dans ses missions. En effet, l’ergonomie est un facteur essentiel pour ce type de système : continuer la mission, donc continuer à se déplacer, à utiliser son armement, etc… avec un masque devient vite un challenge si celle-ci n’est pas réfl échie et maitrisée pour toutes les morphologies et dans toutes les conditions de mise en œuvre susceptibles d’être rencontrées. Le confort physiologique et la dextérité doivent être conservés sans dégradation des performances et ce pendant toute la durée de port.

Le périmètre d’utilisation d’EPIA couvrira un très large spectre. Les exclusions sont les pilotes d’avion de chasse, et les spécialistes de la décontamination, équipés de systèmes spécifi ques (EPPAC ou Equipement de Protection pour Personnel d’Avion de Chasse, et le futur système DELIN pour Décontaminateur à Liaison Intégrée).

De plus, EPIA comprendra à la fois les éléments de protection proprement dits, mais aussi différents accessoires (dispositif de ventilation assistée par exemple) ainsi que le système de soutien nécessaire à la mise en œuvre opérationnelle et permettant notamment d’effectuer les contrôles nécessaires et les opérations de maintenance avant toute utilisation opérationnelle du système, et garantissant que chaque porteur est protégé. De ce point de vue c’est aussi une approche globale et cohérente qui est demandée.
Les pratiques d’ingénierie système maitrisées à la DGA deviennent alors essentielles pour s’assurer de l’exhaustivité, de la cohérence et de la bonne compréhension du besoin des forces, pour le décliner en spécifi cations techniques, puis pour être ensuite à même de contrôler précisément la satisfaction de ces exigences tout au long des étapes de conception et réalisation du produit par l’industriel.

EPIA constitue aujourd’hui le principal pilier de la modernisation de la fonction « protection individuelle » et est un projet important pour les forces, la DGA et l’industrie.

Fabienne MAJID, ICA Directrice du segment de management défense NRBC
Après avoir occupé de nombreux postes dans le domaine naval, comme architecte naval, manager dans le domaine de l’action sous la mer, puis architecte capacitaire en surveillance maritime, Fabienne Majid rejoint la direction technique en 2008 où elle a été sous-directeur de DGA Ingénierie des Projets entre 2011 et 2015. Elle est DSM Défense NRBC depuis 2015.

 

 

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