

LA NAISSANCE DIFFICILE
DE LA BITD DES ÉTATS-UNIS
Le 6 avril 1917, lors de l’entrée en guerre des États-Unis aux côtés de la Grande-Bretagne et de la France, leur armée est indigente et ses stocks inexistants. Le Corps expéditionnaire américain envoyé sur le front a dû être équipé avec des matériels français en quasi-totalité.
Sauf durant la Guerre de Sécession, l’US Army ne possède au XIXe siècle que de modestes effectifs, le pays se sentant protégé par les deux océans. Pour assurer la conquête de l'Ouest, l’US Army ne compte que 25 000 hommes. La première guerre extérieure (depuis la guerre contre le Mexique de 1845) est la guerre hispano-américaine de 1898, en réplique à la destruction du navire cuirassé USS Maine dans le port de La Havane. Si l'US Navy détruit son adversaire espagnol aux Philippines et à Cuba, obtient la suprématie sur ces deux champs de bataille, l’US Army n’est absolument pas convaincante.
Les États-Unis ressentent le besoin d’une flotte puissante pour protéger ses routes commerciales. Une flottille de sous-marins de la classe Plunger est mise en service en 1903. L’US Navy s’affirme en 1908 avec la circumnavigation de la Great White Fleet et devient alors la troisième flotte mondiale en tonnage.
Le retour de la Great White Fleet le 22 février 1909
L’avance industrielle des États-Unis
Les États-Unis sont les pionniers de la construction mécanique en grande série, en particulier dans le domaine automobile où Henry Ford introduisit le taylorisme. En 1914, 485 000 voitures sont produites aux États-Unis face à 100 000 dans toute l’Europe. En revanche, la production d’armement, d’explosifs et de munitions reste largement insuffisante et inadaptée aux besoins des forces. Il n’existe alors qu’une petite industrie des munitions.
L’entrée en guerre déclenche aussi une mobilisation économique, les achats du gouvernement américain et de ses alliés sont coordonnés par le War Industries Board (WIB). Compte tenu des difficultés de la mise en route de l’économie de guerre, le Président Wilson obtient des pouvoirs illimités pour créer, organiser et renforcer les organismes gouvernementaux. Le WIB reçoit l’autorité nécessaire pour répartir les matières premières entre les industries, déterminer les priorités en matière de production, de distribution et de transports, fixer les prix des produits qu'il achetait, standardiser les produits, développer au maximum l'économie de guerre et réquisitionner en cas de nécessité des usines. Les États-Unis produisent fin 1918 plus du triple des poudres et explosifs que la Grande-Bretagne et la France réunies.
En prévision de l’envoi d’un Corps expéditionnaire US sur le champ de bataille du nord de la France aux côtés des troupes françaises, il est décidé que pour des raisons de logistique de théâtre, les États-Unis seront équipés à leur débarquement avec l’artillerie, les mitrailleuses, les véhicules terrestres et aériens fournis par l’industrie française.
Construction aéronautique
Si les frères Wright ont réalisé leur premier vol en décembre 1903, ce sont les Européens qui prennent une avance rapide dans ces technologies, et avaient produit au total 4 000 avions, alors que moins de 100 étaient construits artisanalement aux USA.
L’implication de la France dans la création de la BITD américaine
Si les munitions, fournitures, armes légères et véhicules nécessaires peuvent être produits à partir d’industries déjà établies, en revanche, la situation est infiniment plus complexe pour les armes collectives et le matériel lourd, dont l’artillerie de campagne et les tous premiers chars de combat.
Parmi les armements français dont la production est assurée sous licence aux États-Unis, figure le 155 GPF (Grande Puissance de Feu), canon lourd standard de l'armée française. Le 155 GPF est fabriqué aux États-Unis à partir de 1917, avec les plans en unités métriques. Ce 155 GPF est utilisé par le Corps expéditionnaire comme arme d'artillerie lourde principale jusqu'en 1942.
Autre armement emblématique, le char de 6 tonnes Renault FT-17. Lorsque les États-Unis entrent en guerre en avril 1917, leur armée ne possède aucun char. En raison des exigences de la guerre à l’égard de l’industrie française, il est décidé de mettre en production le FT-17 sous licence aux États-Unis. Une commande de 4 400 exemplaires d'une version modifiée, la M1917, est contractualisée et la livraison, prévue pour avril, n’est effective que le 11 novembre. C’est pourquoi l’armée française doit prêter 144 FT-17 pour équiper deux bataillons. Si aucun M1917 produit aux États-Unis n'est livré au Corps expéditionnaire avant la fin de la guerre, ils seront la base du futur corps blindé américain en 1920.
De son côté, en s’inspirant du char Renault FT-17, la société Ford développe un char de 3 tonnes, le M1918, pour lequel elle reçoit une commande à l’échelle américaine de 15 000 unités, à une cadence de production de 100 par jour. Là aussi, seuls 15 exemplaires sont produits avant le 11 novembre.
Côté aéronautique, citons le LUSAC, un chasseur lourd de conception française devant être produit aux États-Unis et conçu par Georges Lepère, un ingénieur français. Si la commande est de 3.525 appareils, seule une trentaine est construite avant l’annulation du marché à l’armistice. L’aviation militaire américaine a reçu jusqu’à l’armistice un total de 6 364 avions, dont 4 874 avions produits en France, et 1 213 fabriqués sous licence aux États-Unis.
L’engagement américain au cours de la Première Guerre mondiale.
Les chefs militaires français et anglais souhaitent amalgamer les soldats américains (les Sammies) dans les différentes armées existantes, mais le général Pershing obtient que le Corps expéditionnaire demeure une entité indépendante.
Au 16 mars, à la veille de la grande offensive allemande du Général Ludendorff, il n’y avait sur le territoire français que 157.420 combattants américains, dont l’appui à donner aux armées de l'Entente est limité. Seule, la 1ère division est apte à participer à une grande bataille. Les trois autres tiennent des secteurs calmes en Lorraine où elles complètent leur instruction d'une durée de cinq mois.
Le 11 novembre 1918, plus de deux millions de Sammies étaient en Europe continentale. Les forces américaines ont perdu 53 000 hommes au combat et ont pu aider les alliés à stopper la dernière grande offensive allemande qui s’est achevée par la seconde bataille de la Marne.
Après l’Armistice
Les avions de combat de fabrication américaine sont arrivés trop tard pour avoir un impact militaire important ou pour donner un élan important à une industrie. Lorsque les contrats ont été annulés avec l'armistice, l'industrie aéronautique s'est effondrée. La fin du conflit interrompt immédiatement la production des armements, à l’exception de navires, qui seront victimes du traité des armements navals de Washington, celui-ci évitant un conflit ouvert entre les États-Unis et le Royaume Uni.
Dans l’aéronautique, des ingénieurs talentueux développent à partir des années 1930 d'excellents appareils civils comme le Douglas DC-3 et militaires, mais à un faible rythme de production. Dans le domaine terrestre, l'artillerie et les chars d'assaut sont complètement délaissés.
En 1920, le National Defence Act donne au gouvernement fédéral des États-Unis les moyens d’orienter l'économie au service de l'effort de guerre en cas de conflit. A partir de 1938, les commandes massives françaises et britanniques permettent à l'industrie américaine de s'organiser pour le futur effort de guerre. Dès ce moment, la BITD américaine prend la première place, qu’elle possède toujours.
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