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Création du réseau AMN sous l'impulsion du général Mc Chrystal
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30 octobre 2022

L’INTEROPÉRABILITÉ, TALON D’ACHILLE DES COALITIONS
L’INTEROPÉRABILITÉ « BY DESIGN » EST UN ENJEU MAJEUR POUR ASSURER L’EFFICACITÉ DES MISSIONS DE COALITION.

Comment assurer l’interopérabilité au sein d’une mission de coalition quand l’interopérabilité au sein des forces aéroterrestres et navales d’une même nation est déjà un challenge ? 


Dès la création de l’OTAN en 1949, l’article 3 du Traité de l’Atlantique Nord sous-entend l’interopérabilité de ses membres pour « agir individuellement et conjointement, d’une manière continue et effective, par le développement de leurs propres moyens et en se prêtant mutuellement assistance ». Pour autant, le mot interopérabilité n’est pas mentionné explicitement dans le traité, ce terme ayant été employé uniquement à partir des années 70, avec une forte connotation technique.

Création du réseau AMN sous l’impulsion du Général McChrystal, commandant de la force internationale d’assistance et de sécurité en Afghanistan 

Aujourd’hui, l’interopérabilité est un enjeu fort pour l’OTAN, qui la définit comme la capacité à agir conjointement au sein de l’Alliance, de manière cohérente et efficace, tant sur le plan technique que sur le plan des procédures et des forces elles-mêmes. 

Sous l’égide de l’OTAN, le Général McChrystal, commande la force internationale d’assistance et de sécurité en Afghanistan entre juin 2009 et juin 2010. Il constate : « les forces de coalition en Afghanistan ne peuvent pas communiquer efficacement et partager les directives opérationnelles du commandement, des informations ou du renseignement. Ces lacunes dans la communication induisent des risques pour les vies, les ressources et l’efficacité de nos forces ». De ce constat opérationnel naît la nécessité de réseau AMN. 

Si le développement de normes et de standards est pris en compte depuis plusieurs décennies au sein de l’OTAN, la récente mission de coalition en Afghanistan a permis de mettre en lumière que ceuxci n’étaient pas suffisants et qu’il était nécessaire de déployer un réseau commun pour communiquer efficacement. C’est ainsi que le réseau AMN « Afghanistan Mission Network » a été déployé dès janvier 2010, dans le but de faciliter le commandement, la prise de décision et le partage d’informations en connectant efficacement les forces de coalition.

L’initiative FMN, Federated Mission Networking, a été construite sur le retour d’expérience du réseau AMN, avec la perspective d’atteindre l’interopérabilité dès le premier jour d’une mission de coalition « day zero interoperability », et non pas plusieurs mois après son démarrage, comme en Afghanistan. Le concept FMN est de faire progresser l’implémentation des standards en temps de paix, de manière cadencée, permettant ainsi de synchroniser l’effort de standardisation des 38 nations affiliées à l’initiative FMN, dans le domaine du C4ISR : « command, control, communication, computers, intelligence, surveillance and reconnaissance », à savoir l’ensemble des fonctions de commandement, contrôle, communication et de renseignement militaire.

Day Zero interoperability

Contrairement à l’AMN, FMN n’est pas un réseau. Les nations affiliées ont fait le choix de conserver au niveau national l’acquisition ou l’adaptation de leurs matériels aux standards FMN. Il n’existe pas de hub FMN avec lequel chacune des nations cherche à être interopérable. FMN vise à faire travailler ensemble toutes les nations affiliées avec les mêmes procédures, avec des personnels entraînés de matière homogène, et des matériels propres, capables d’interagir entre eux, puisqu’ils respectent les spécifications techniques de référence.

FMN n’est pas un réseau 

FMN ne s’intéresse pas uniquement à l’interopérabilité technique des matériels, qui, en tant que telle, n’est pas suffisante pour assurer des missions de coalition efficaces. La standardisation des procédures est un prérequis au moins aussi important. 

Les 38 nations affiliées à l’initiative FMN se retrouvent ainsi face à la nécessité de développer l’interopérabilité avec leurs alliés et partenaires alors que l’interopérabilité entre les milieux n’est pas toujours acquise au sein de leurs forces nationales. FMN est un atout majeur pour améliorer l’échange d’informations entre les différents domaines. La standardisation de ces échanges s’imposera naturellement au niveau national. 

L’interopérabilité des forces armées française avec ses alliés et partenaires est aujourd’hui multiforme et très différenciée selon les milieux et les métiers. Le milieu maritime a ainsi acquis en termes de communications tactiques un niveau d’interopérabilité fiable et ancien. A contrario, dans le domaine des opérations terrestres, l’interopérabilité aux niveaux tactiques bas est une nécessité relativement nouvelle, soulignée notamment avec les engagements en contre-insurrection en Afghanistan à partir des années 2000. 

Par ailleurs, la mise en place d’une vraie capacité à inter-opérer avec ses alliés ou partenaires nécessite encore un processus très long, que ce soit pendant le processus de génération de forces ou pendant la phase de montée en puissance sur le théâtre. Un tel processus de montée en puissance reste peu modulable et peu réactif, surtout dans un contexte d’engagement de haute intensité.

J’ai eu la chance de travailler pendant 3 ans au sein du grand commandement de la transformation de l’OTAN à Norfolk, en tant que chef de la branche interopérabilité fédérée. Je suis convaincue que l’initiative multinationale FMN s’impose aujourd’hui comme le vecteur principal d’interopérabilité des systèmes d’information et de communication en environnement interallié. L’implémentation des spécifications de procédures et techniques nécessite l’adaptation des capacités acquises par les nations, qui n’ont pas toujours été nativement conçues pour être interopérables. L’étape ultime à atteindre est une interopérabilité « by design », qui nécessite encore un changement dans les modes d’acquisition nationaux. 

 

 

 

Réunion du Management Group FMN en Mai 2019, qui rassemble les représentants de l’ensemble des affiliés, qu’ils soient membres de l’OTAN ou partenaires de l’Alliance. 

 

 

 Cécile Marly, ICA, sous-directrice de la gestion de la qualité à la direction du développement international de la DGA

X1995, Cécile Marly a débuté sa carrière à l’ETBS. Elle a consacré plus de 10 ans au développement économique et au soutien à la BITD. Après un poste de chef de branche interopérabilité fédérée au sein de l’OTAN, elle a réintégré la DGA en 20 au sein de la direction internationale. 

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