Retour au numéro
La France et quatre autres pays européens se sont engagés dans le cadre de la coopération structurée permanente à développer une capacité de défense contre les nouvelles menaces hypersoniques
Vue 296 fois
01 mars 2020

Menace aérienne 2020 : une nouvelle dynamique qui nécessite des réponses adaptées

Ces dernières années ont vu émerger un nouveau cycle et une dynamique sans précédents concernant les menaces aériennes.


Le missile de croisière naval russe Zircon propulsé par un superstatoréacteur serait capable d’une portée de 1.000 km et d’une vitesse de Mach 8. © DR

Les missiles hypersoniques, nouvelle course aux armements impulsée par la Russie

Du côté des grandes puissances, la Russie s’est engagée tous azimuts dans le développement d’une nouvelle génération d’armes stratégiques. Après l’Iskander qui a permis d’accroitre considérablement la précision et la capacité de pénétration de missiles balistiques tactiques, sa version aéroportée sous la dénomination Kinzhal accroit ainsi sa portée tout en offrant des options de mise en œuvre beaucoup plus variées.

Mais la nouveauté réside réellement dans le développement d’une toute nouvelle génération de vecteurs hypersoniques (vitesse supérieure à Mach 5), sous la forme de missile de croisière, tel le Zircon, ou de planeur tel l’Avangard, sans parler d’un projet probablement beaucoup plus futuriste et lointain de missile de croisière à propulsion nucléaire (Burevestnik).

Fait nouveau, c’est la Russie qui impose son rythme dans cette nouvelle course aux armements stratégiques. Les Etats-Unis ont désormais également engagé des investissements massifs dans le développement de ces nouveaux vecteurs. La Chine et dans une moindre mesure l’Inde sont également très engagées avec par exemple le planeur hypersonique chinois DF17 ou encore le projet de missile de croisière Russo-indien Brahmos II dérivé du Zircon.

La France n’est pas absente de ces études de technologies hypersoniques au travers des études de définition de la future composante stratégique aéroportée ASN4G ou encore via le développement du démonstrateur de planeur hypersonique V-MAX.

Le développement de vecteurs hypersoniques, que ce soit des missiles de croisière dotés d’un super-statoréacteur ou des planeurs mis à poste par un missile balistique est riche d’enjeux technologiques majeurs. La propulsion à base de stato-réacteurs est l’un de ces enjeux technologiques incluant le recours à des matériaux compatibles des exigences de la combustion supersonique sans compter de nouvelles solutions aérodynamiques, la maîtrise du contrôle et pilotage de tels vecteurs ou encore leur guidage final et l’intégration d’une liaison de données éventuellement affectée par des phénomènes de création de plasma dans certaines parties du domaine de vol. Bien qu’ayant atteint un degré de maturité variable selon les différents projets, missiles de croisière et planeurs hypersoniques seront très probablement mis en service dans le courant de la décennie à venir.

Dans la compétition perpétuelle entre l’épée et la cuirasse, après la prolifération des missiles balistiques qui a engendré l’apparition de systèmes de défense anti-missiles, ces nouveaux vecteurs hypersoniques redonnent l’avantage à la capacité offensive. Leur très grande manoeuvrabilité, leurs trajectoires dans des gammes d’altitudes (40 à 60 km) inhabituelles pour des vecteurs endo-atmosphériques conventionnels, leur portée accrue et enfin leur grande imprédictibilité rendent ces menaces particulièrement difficiles à contrer. C’est un changement de paradigme pour les défenses anti-missiles balistiques dont l’architecture repose sur l’hypothèse de trajectoires prédictibles. Les systèmes dit IAMD (Integrated Air & Missile Defence), traitant non seulement des missiles balistiques tactiques mais aussi des missiles de croisière ou encore les défenses surface-air protégeant les navires de surface, sont mieux prédisposées au traitement de ces menaces.

Le planeur hypersonique DF-17 lors des célébrations du 70e anniversaire de la RPDC en octobre dernier devait être mis en service dans les semaines qui suivent. © DR

Sur la base d’un concept novateur de missile intercepteur endo-atmosphérique proposé par MBDA, en novembre 2019, à l’initiative de la France, plusieurs pays de l’UE (Espagne, Finlande, Italie, Pays-Bas) se sont engagés dans le cadre de la Coopération Structurée Permanente, à développer ensemble une capacité de défense anti-missile qui doit permettre de contrer ces nouvelles menaces. Ce projet dénommé TWISTER (Timely Warning and Interception with Space-based ThEateR Surveillance) est également composé d’une composante spatiale d’alerte.

Planification et mise en œuvre d’attaques complexes et de précision démontrée

Les frappes sur les installations pétrolières saoudiennes en 2019 ou encore les frappes Iraniennes contre des bases aériennes iraquiennes en ce début d’année ont démontré une parfaite maîtrise de l’utilisation combinée de drones, missiles de croisière et missiles balistiques. Les effets maîtrisés et intentionnellement contenus de ces frappes ne doivent pas occulter leur efficacité militaire potentielle.

Cette menace complexe et précise confirme la pertinence des défenses anti-aériennes et anti-missiles intégrées. Seule une intégration poussée de moyens adaptés en termes de performance et de coût de possession aux différences menaces permet de déployer une protection efficace contre ce type d’attaque. De ce point de vue, la France et l’Italie avec le système SAMP/T ou encore l’Allemagne avec le projet TLVS n’ont jamais perdu de vue la nécessité de faire face à des frappes coordonnées de vecteurs hétérogènes.

Toujours plus d’innovation dans le domaine des mini et micro-drones

L’utilisation de mini et micro-drones poursuit sa croissance dans le domaine civil avec de possibles détournements à des fins hostiles. Les survols répétés d’installations aéroportuaires ou de différentes installations critiques ne doivent pas occulter la capacité avérée d’acteurs non-étatiques à mettre en œuvre des drones aériens armés.

La détection et la caractérisation de drones contrôlés à distance est désormais possible grâce à des équipements d'analyse radiofréquence passive qui peuvent être complétés par des radars actifs ou des dispositifs électro-optiques, leur neutralisation pouvant être réalisée en brouillant la liaison de données ou encore le système de positionnement. L’émergence de drones dotés d’une capacité de navigation autonome qui les rend discrets et robustes au brouillage est l’un des nouveaux enjeux de la lutte anti-drones. Des « mini-effecteurs » pourraient être employés mais la menace d’essaims de drones nécessitera probablement un traitement adapté.

Les travaux actuels sur les armes à énergie dirigée, tant lasers que micro-ondes de forte puissance sont prometteurs. Les concepts d’emploi et les règles de sécurité spécifiques à chacune de ces solutions doivent encore faire l’objet de développements. Des travaux sont engagés à l’échelle européenne sur les différentes briques technologiques nécessaires à l’élaboration de ces armements. La vulnérabilité des drones face à ces nouveau type d’effecteurs est également en cours d’étude pour permettre de dimensionner correctement les futurs systèmes.

MBDA, acteur européen pour des réponses adaptées aux nouvelles menaces

Tout d’abord, MBDA cultive son expertise ainsi que son autonomie d’appréciation concernant l’analyse de la menace et des tactiques d’emploi adverses afin d’être en mesure d’apporter les réponses adaptées aux besoins de nos Forces.

MBDA est en mesure d’apporter l’ensemble des compétences et technologies requises pour faire face à ces menaces. A titre d’exemple, MBDA a proposé un concept d’intercepteur novateur pour faire face aux missiles balistiques et hypersoniques dans le cadre du projet Européen TWISTER. MBDA conduit également différentes études sur les armes à énergie dirigée à base de lasers ou de micro-ondes dans des cadres nationaux mais aussi dans le cadre de l’Europe de la Défense. Enfin, MBDA investit dans des architectures système innovantes qui permettront entre autres l’intégration de ces futurs effecteurs mais qui repensent également le rôle des opérateurs dans la chaîne d’engagement.

En tant qu’acteur européen reconnu, MBDA soutient activement la mise en place des cadres de coopération intergouvernementale et européenne indispensables au développement de cette future génération de systèmes et effecteurs.

    
Olivier Martin, IGA, Secrétaire général de MBDA
 
Olivier Martin, X77-ENSTA, débute sa carrière à la DGA comme Directeur du programme Mesures du BEM Monge. En 1991, il rejoint Matra Défense comme Directeur des Opérations Internationales, en charge des compensations et offsets. En 2003, il rejoint le groupe EADS où il dirige l’entité Defence Electronics France. Depuis fin 2007, il est le Secrétaire Général du groupe MBDA. Chevalier de la Légion d’Honneur et dans l’Ordre National du Mérite. 
 

 

 

Auteur

Olivier Martin a débuté sa carrière en 1983 à la DGA notamment comme Directeur du programme Mesures du BEM Monge, puis responsable Allemagne, Italie, Pays-Bas, Scandinavie à la Délégation aux Relations Internationales.
En 1991, il rejoint Matra Défense comme Directeur des Opérations Internationales, puis responsable Business Development du secteur anti-surface, puis directeur des programmes anti-surface.
En 2003, il dirige l’entité Defence Electronics France d’EADS, puis la stratégie de l’entité DS SAS d’EADS.
En 2007, il rejoint MBDA en tant que Secrétaire Général du groupe.
En 2021, il crée la société de conseil ICARION Consulting dont il est le Président.

Voir les 18 autres publications de l'auteur

Articles liés par des tags

Commentaires

Aucun commentaire

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire. Connectez-vous.