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Le Guépard
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01 octobre 2019

Le MCO, objectif prioritaire d'Airbus Helicopters

Enjeu majeur des armées, le Maintien en Condition Opérationnelle (MCO) des équipements les plus complexes est aussi au cœur des préoccupations d’Airbus Helicopters. Illustration avec les travaux en cours sur les flottes Tigre, Cougar et Caracal.


Le H160, la maintenance a été prise en compte dès la conception

Le sujet complexe du Maintien en Condition Opérationnelle (MCO) est un habitué des rapports parlementaires et des titres chocs. Il a également été le thème central d’un discours fondateur prononcé par la Ministre des Armées, le 11 décembre 2017 sur la base aérienne d’Evreux. Florence Parly y détaillait alors un MCO placé « dans une situation pas tenable ». « Le MCO suscite l’intérêt c’est certain, il suscite l’imagination aussi (...) puisque, en 2011, plus de 300 recommandations de haut niveau ont été faites. Mais il était temps que le MCO suscite l’action » expliquait-elle ensuite, avant d’annoncer une réforme majeure de l’activité de maintenance, de sa gouvernance et des liens entre l’institution et les industriels.

Airbus Helicopters est placé en première ligne dans la question du MCO et de sa réforme. Leader mondial de l’hélicoptère, avec plus de 12 000 appareils présents sur les marchés civil et militaire, il est aussi le premier fournisseur de l’État français avec environ 600 appareils en service. La médaille est belle, mais elle a un revers : les flottes sont très diverses, trop sans doute, et elles sont pour beaucoup d’entre elles âgées.

Il faut ici rappeler l’importance du programme HIL (Hélicoptère Interarmées Léger)  pour lequel le H160M a été sélectionné. L’hélicoptère remplacera à lui seul cinq types d’appareils dans les trois armées, air, terre et mer, avec à la clef une rationalisation des flottes et une mutualisation des efforts en matière de MCO.

La gestion de la maintenance du H160, entièrement numérisée, a été intégrée dès les premières phases de conception de l’appareil. Elle a ensuite été testée tout au long du développement de manière à garantir une maturité élevée de l’appareil dès son entrée en service. L’appareil offrira donc des coûts d’opération et de soutien maîtrisés, calqués sur les exigences des opérateurs civils. Signe de l’importance de ce programme, son lancement a été avancé à 2021, avec un an d’avance sur les prévisions de la LPM (Loi de Programmation Militaire).

Le soutien technique des flottes actuelles fait appel quant à lui à une grande diversité d’intervenants, encore plus quand il s’agit de programmes menés en coopération comme le Tigre ou le Caïman, ce qui se traduit par une grande complexité de son organisation. Le tout sur fond d’opérations extérieures longues, difficiles, loin de la métropole. Le cocktail est explosif...

Dès 2015, pour gagner en efficacité, Airbus Helicopters a regroupé toutes les capacités industrielles au service des opérateurs étatiques français au sein d’une structure unique : le « Military Support Center – France ». Il a également longtemps plaidé en faveur de contrats de soutien globaux, qui feraient prendre à un maître d’œuvre principal la responsabilité de la gestion des stocks et de la disponibilité des pièces détachées. Le discours de 2017, la création concomitante de la Direction de la maintenance aéronautique (DMAé), responsable de la performance du MCO aéronautique, a catalysé le recours à de tels contrats de soutien globaux.

Airbus Helicopters considère que cette « verticalisation » des activités de support est un facteur clef d’amélioration de la disponibilité des hélicoptères. Cela se traduit notamment par une clarification des responsabilités, des engagements contractuels de performance sur les activités logistiques, avec une totale délégation de la gestion des approvisionnements (sur le modèle de ce qui se fait dans le monde civil). Des partenariats ciblés sont également mis en place par Airbus Helicopters avec le SIAé et différents industriels français reconnus pour améliorer l’efficacité globale du dispositif de soutien. Deux contrats en cours de négociation, sur le Tigre et la famille Cougar/Caracal, sont particulièrement représentatifs des efforts déployés.

Le MCO du Tigre se distingue aujourd’hui par une architecture contractuelle qui n’a pratiquement pas évolué depuis l’entrée en service de l’appareil, en 2005. Le soutien reste basé sur contrats multi nations, sans engagement sur les délais, les prestations étant tributaires des capacités d’approvisionnement et de réparation des fournisseurs. A ces contrats s’ajoutent ceux couvrant les équipements nationaux. Au total, c’est un MCO très fragmenté avec pas moins d’une quarantaine de contrats en place. L’analyse des causes d’indisponibilité de la flotte Tigre en 2018 montre que l’impact de la seule logistique s’avère important. L’enjeu d’un nouveau contrat porte sur des engagements ambitieux autour des activités logistiques avec

-  un engagement de disponibilité sur le périmètre total des pièces, à l’exception des moteurs, du viseur et de l’armement ;

-  une totale délégation de la gestion des approvisionnements de pièces neuves, des réparations, des consommables et ingrédients ;

-  un engagement renforcé des fournisseurs et sous-traitants par la mise en place de contrats à engagement de performances ;

- la gestion des obsolescences renforcée avec une veille et une gestion plus réactives et la délégation à Airbus Helicopters du traitement des LBO (Life Beetwen Overhaul).

Le contrat de soutien global en négociation vise ainsi un apport opérationnel important tout en restant financièrement équilibré pour l’Etat, avec à la clef une gestion des risques et un pilotage de la performance consolidé.

Présentation du Guépard le 27 mai 2019 à Marignane par la Ministre Florence Parly 

Autre exemple emblématique, celui des flottes Cougar et Caracal. La première est gérée par un contrat de RBH (Repair by the Hour) couvrant seulement 60 équipements, complété par d’autres contrats de la DMAé pour le reste du périmètre. La flotte Caracal bénéficie quant à elle d’un contrat PBH (Parts by the Hour)dont le niveau de performance est proche de 95%. Airbus Helicopters et la DMAé travaillent depuis plus d’un an sur l’évolution de ces contrats de soutien, avec comme objectif la mise en place d’un schéma de soutien totalement intégré (gestion des stocks et flux logistiques, soutien technique du CAMO (Continuing Airworthiness Management Organization), maintenance...) dont il assurerait la maîtrise d’œuvre. En s’appuyant sur une optimisation de la mise à disposition des pièces et la réduction des cycles de visites périodiques, la « verticalisation » du MCO Cougar pourrait procurer d’ici 2021 l’équivalent de cinq appareils supplémentaires en moyenne.

L’industrie aéronautique et plus particulièrement de l’hélicoptère est passionnante et sa mutation actuelle est porteuse de nombreuses opportunités dans tous les secteurs qu’elle irrigue. Elle offre, dans un contexte d’amélioration des performances, une diversité et richesse de métiers, allant de la logistique, l’industrie, le support technique, au commercial avec la gestion de nombreuses interfaces clients opérant dans des contextes multiples en passant par le développement du digital. L’essor de ces services digitaux et la maîtrise de la donnée apportent une plus-value clé quant à l’optimisation de la disponibilité des appareils et des couts de maintenance.

L’évolution du MCO vers une plus grande responsabilisation et engagements de l’Industrie en termes de valeur ajoutée ne pourront être tenus qu’avec le développement de nouveaux produits et services adossés à de nouvelles compétences. La diversité des expertises nécessaires à la mise en œuvre de ces contrats sont autant d’attraits et d’intérêts pour les ingénieurs de l’Armement.

    
Bruno Even, ICA, PDG d’Airbus Helicopters
Diplômé de l’École polytechnique, Bruno Even travaille à la Direction générale de l’Armement puis entre chez Turboméca en 1999. Il est directeur de Sagem Défense Sécurité entre 2013 et 2015 puis de Turboméca, devenu Safran Helicopter Engines, entre 2015 et 2018. En 2018, il succède à Guillaume Faury à la tête d’Airbus Helicopters.
 

 

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