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01 octobre 2014

DES CONSEILLERS DU COMMERCE EXTÉRIEUR OFFENSIFS !

Publié par Jacques Bourgeois | N° 104 - Le Naval

L’Arabie est un pays dont on ne peut pas préparer la conquête uniquement en chambre ou sur internet. Pour réussir à s’y développer il faut d’abord se rapprocher des acteurs institutionnels qui travaillent depuis la France (Direction Générale du Trésor, Coface, Medef International, Chambres de commerce et d’industrie, Chambre de Commerce FrancoArabe…) ou qui se sont déployés en Arabie (Service Economique de l’Ambassade de France, Ubifrance, Alliance Française, Conseil des Chambres de Commerce Saoudiennes, Chambres de commerce de Riyad et de Djedda, Conseil d’Affaires Franco-Saoudien (CAFS), Cercle d’Affaires Franco-Saoudien de Djedda (CAFSDA), hommes d’affaires expatriés… et Conseillers du Commerce Extérieur de la France, les fameux CCEF !


 Les CCEF d’Arabie organisent des séminaires de sensibilisation aux marchés du Royaume, à Paris ou dans les régions, en direction des PME et des directions des ressources humaines des grands groupes. La section intervient régulièrement avec les pouvoirs publics dans les principaux centres régionaux de l’Arabie pour accompagner les efforts des compagnies françaises, qu’elles soient déjà implantées ou représentées ou encore au stade de l’exploration. Pour cela elle travaille étroitement avec les communautés d’affaires de Djedda, de Dammam, de Tabuk, de Najran, du Qassim… La section organise des réunions de travail périodiques centrées sur la résolution des problèmes pratiques posés aux investisseurs, aux exportateurs et aux importateurs : législation, fiscalité, « saoudisation », droit des contrats, formation, sponsorship, visas, normes, pratiques d’affaires…

La présence française dans le Royaume, quoique ancienne, reste insuffisamment diversifiée. Pourtant les possibilités de développement du « Club France » sont considérables. Pour atteindre le cœur de la cible saoudienne, nos entreprises doivent en fait retenir l’acronyme PME :

P comme Pétrole et dérivés du pétrole au sens large : de toute évidence les marchés liés aux secteurs pétroliers et parapétroliers sont extrêmement porteurs en Arabie et les entreprises françaises ont des atouts décisifs dans ces domaines. Ceci est également vrai pour la parachimie, sans oublier les produits qui sont ici dérivés du pétrole (production d’eau potable et d’électricité à partir de cette énergie, tubes…).

M comme Ménages : « la consommation est la seule et unique fin de l’activité économique » disait Keynes, et cela est avéré en Arabie plus qu’ailleurs : l’accroissement de près de 3 % par an de la population induit une augmentation encore plus rapide de la consommation, sous les effets combinés d’une convergence accrue vers les modes de vie occidentaux, d’une montée en gamme des demandes et de l’appétit de vivre d’une génération de « baby-boomers » comparable à celle qui avait porté la France des années 60. Un exemple de réussite en matière de biens alimentaires est celui de la joint-venture Al Safi-Danone. D’autres niches, comme celles des produits pour enfant ou du marché de l’hygiène, sont à creuser. Avec cette croissance démographique soutenue, qui s’accompagne de la multiplication des cellules de consommation, les marchés des biens durables sont hyperactifs : les ventes de produits dits bruns ou blancs, d’automobiles, de meubles, de biens semi-durables (vêtements, chaussures, etc.) sont extrêmement dynamiques. Dans ces secteurs, les taux de croissance annuels en volume sont à deux chiffres. Le logement, l’aménagement du foyer et l’activité BTP sont durablement portés par les besoins démographiques. En matière de services, la distribution, les télécommunications, l’informatique, les transports, les services rendus aux ménages sont autant de créneaux en essor rapide. Il en va de même pour les spécificités françaises traditionnelles que constituent les pratiques de la franchise et le marché du luxe.

E comme État : considéré au sens large, c’est une cible très attractive car le secteur public et parapublic est hypertrophié en Arabie. Sont, entre autres, concernés les marchés de la défense, de la sécurité, de la e-gouvernance. Dans le secteur parapublic, il faut aussi suivre avec attention les appels d’offres lancés par des sociétés comme Sabic, Saudi Aramco, SEC, STC, Saudia International Airlines, etc. réputés très bons payeurs.

L’essentiel, face à ce marché passionnant, c’est de parvenir à oublier ses préjugés. Des préjugés géographiques d’abord. Certains hommes d’affaires pressés ne distinguent pas la Péninsule Arabique de l’Arabie Saoudite, oubliant que la première regroupe sept pays, tandis que la seconde n’en forme qu’un : le Royaume d’Arabie Saoudite, quatre fois la superficie de la France, recouvre l’équivalent de l’Europe Occidentale, tandis que le Koweït n’en représente que 0,8 % et Bahreïn 0,03 %. Il ne viendrait à l’idée de personne d’aborder de la même façon les marchés londonien, berlinois, romain ou madrilène… Pourquoi donc devrait-on imaginer que les marchés de Dammam, de Riyad, de Djeddah ou de Najran sont similaires ? Des préjugés sociologiques ensuite. Les media pressés vont jusqu’à assimiler les mœurs apparemment libérales des Emirats Arabes Unis aux règles plus strictes du Royaume d’Arabie Saoudite. Ils confondent allègrement Dubaï, une ville-monde, avec l’austère et provinciale cité de Riyad. Ils croient voir dans l’Etat spectacle qatarie une préfiguration de l’Arabie de demain. Ils ne peuvent même pas imaginer qu’il y a de grandes différences de comportements entre les habitants et les décideurs de la région centrale du Nadjd et ceux de La Mecque ou de Jizan.

Pour préparer la victoire, que ce soit sur le marché de l’armement ou ailleurs, il y a donc une démarche préalable à accomplir : abandonner ses idées toutes faites et se construire pas à pas une image plus juste du pays qui s’avérera aussi propice aux affaires... Cela implique un profond engagement des dirigeants des entreprises : leurs numéros un, deux, trois… doivent venir régulièrement en Arabie, pour mieux évaluer ses marchés et leurs environnements et y soutenir activement leurs personnels. 

Auteur

Jacques Bourgeois
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