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01 mars 2019

L'OCCAR, UNE ORGANISATION D'AUJOURD'HUI POUR PRÉPARER DEMAIN

L’Organisation Conjointe de Coopération en matière d’Armement (Occar) a célébré l’an passé le 20ème anniversaire de la signature de sa Convention par les gouvernements d’Allemagne, de France, d’Italie et du Royaume-Uni le 9 septembre 1998, convention ensuite ratifiée par les Parlements respectifs de ces pays en 2001. La Belgique et l’Espagne ont ensuite rejoint l’organisation en 2003 et 2005. Ces six pays membres président aux destinées de l'Occar. Une demi-douzaine d’États non membres participent à plusieurs programmes de l’Occar.


Le positionnement de
l’Occar


L’Occar, depuis sa création, se veut le champion européen pour la conduite des programmes d’armement complexes, en coopération, sur l’ensemble de leur cycle de vie, aux bénéfices des forces armées. Pour y parvenir, l’organisation repose sur des grands principes, dits de Baden-Baden, comme le renoncement au juste retour industriel, l’efficacité des méthodes d’acquisition, l’harmonisation du besoin des nations ou l’ouverture des programmes aux pays non membres. L’Occar est une véritable rampe de lancement de standards en matière d’équipement, avec par exemple le Tigre dans le domaine des hélicoptères de combat, l’A400M pour l’aviation de transport, Essor pour la radio logicielle ou encore le drone européen Male RPAS. Située à Bonn, Malakoff (bientôt Chatillon), en Espagne ou encore en Italie, l’Occar a clairement une vocation européenne et l’ambition de renforcer la base industrielle et technologique de défense européenne.

Les programmes

L’avenir de l’Occar repose sur l’introduction croissante de nouveaux programmes d’armement en coopération. Actuellement, l'Occar gère treize programmes couvrant l’ensemble des domaines des forces armées, avec des programmes terrestres tels que l’hélicoptère Tigre, le véhicule blindé Boxer, le système de radar contre batteries Cobra et le système anti-aérien SAMP/T, aéronautiques avec l’avion de transport A400M et le ravitailleur en vol MMF, navals avec le pétrolier ravitailleur LSS et les frégates Fremm et PPA, des programmes de missiles avec FSAF-PAAMS et l’Aster, des programmes de communications avec Essor ou encore des programmes dans le spatial avec Musis. La France est le premier contributeur en participant à dix programmes, suivie par l’Allemagne et l’Italie. Tous les États-membres de l’Occar participent à au moins un programme ainsi que sept autres pays non membres comme la Lituanie, la Pologne ou la Turquie.

Parlons budgets et finances

Le carnet de commande de l’Occar est actuellement de 60 milliards d’euros. Son flux financier annuel est supérieur à 3,5 milliards d’euros et situe l’Occar à un niveau élevé dans le concert européen, en comparaison du budget acquisition des nations européennes. Environ 30 % de ses financements sont français. L’Occar agit comme agent des pays qui lui confient leurs budgets et conduit les programmes et développement concernés. Les paiements sont gérés par une entité unique, la Division Finances de l’Occar, appartenant au siège central de l’Occar. Depuis 2011, les comptes de l’Occar ont été certifiés sans réserve par le Collège des Auditeurs (BOA1), émanation des Cours des comptes des six États-membres. Les comptes de l’Occar respectent désormais la comptabilité générale ou d’exercice, autrement appelée norme IPSAS2, prouvant que la situation financière de l’Occar est bien retranscrite dans ses comptes et que les fonds transmis par les Nations à l’Occar sont bien utilisés selon leur objet souhaité. L’Occar mesure la balance globale pays par pays du retour industriel par rapport à l’argent investi. C’est une approche multiprogramme et pluriannuelle, qui fait apparaître de bons résultats pour la France. Cette mesure est indicative, elle n’implique pas de juste retour aux niveaux des pays participants (principe de Baden-Baden énoncé plus haut).

Parlons Ressources Humaines : l’Occar se veut un pôle d’excellence


L’Occar totalise un peu plus de 280 personnels toutes nations confondues dont un peu moins de 30 % de Français. Le bureau central compte une soixantaine de personnels à Bonn, le reste étant en division de programme dans les différents sites de l’Occar. L’Occar, bien sûr, croît au fur et à mesure de l’intégration de nouveaux programmes mais reste flexible en proposant des contrats courts (cinq ans maximum). L’originalité de l’Organisation tient dans le fait que le recrutement s’effectue par compétition. Pour chaque poste, il est recherché un équilibre raisonnable du nombre de personnels entre Nations. Le turnover est important, chaque année une cinquantaine de postes sont renouvelés. Au global, le coût d’intervention de l’organisation est faible, 1,3 %.

Le retour d’expérience des personnels est considéré comme étant une plus-value, d’une part pour les personnels et d’autre part pour le ministère des Armées qui valorise les rentrants en mettant à profit leur expérience Occar à leur retour. Toutefois comme l’Occar recherche des gens d’expérience, il est parfois difficile d’arriver à proposer des candidats sur des postes critiques techniques ou en management sachant que la ressource humaine est globalement rare. L’expression consacrée étant « we are all fishing in the same lake ».

Les défis de l’Occar d’aujourd’hui et pour demain

Même si l’Occar revendique une place de choix dans la conduite des programmes d’armements complexes menés en coopération multilatérale, une partie de son futur se situe en lien avec l’Union Européenne. La Commission Européenne a pris plusieurs initiatives en faveur de la sécurité et de la défense, pour améliorer la compétitivité de sa base industrielle et technologique. Il s’agit du Programme Européen de Développement Industriel dans le domaine de la Défense3, doté d’un budget de 500 millions d’euros pour la période 2019 2020, et du Fond Européen de Défense avec 1 G€ par an jusqu’en 2027. Certains projets candidats de ces initiatives font également partie de la Coopération structurée permanente4 à laquelle participe un nombre élevé d’États-membres de l’Union, ce qui augmente encore la participation potentielle de l’Union Européenne à leur financement.

L’Occar aura certainement un rôle important à jouer dans ce cadre sur de gros programmes emblématiques comme le Male RPAS ou le Tigre mais aussi des développements complexes comme la radio logicielle Essor. Pour l’heure le programme de travail de cette initiative européenne doit encore être voté au Parlement européen.

En conclusion

La coopération internationale et l’Europe de l’armement sont affaire de patience et rien n’est jamais acquis. Les marches gravies peuvent se dégringoler rapidement. Pour cette raison l’Occar se remet continuellement en question et sans cesse met ses méthodes au meilleur standard. L’organisation a l’ambition d’être le premier choix en Europe sur son domaine d’activité. A la différence des bureaux de programmes créés à l’occasion, elle offre des infrastructures déjà existantes, des méthodes éprouvées que chacun peut retrouver en ligne (www.occar.int) et une vraie expérience en matière de conduite de programme en coopération.

Pour ma part je vous donne rendez-vous ici même, dans quelques mois, pour juger des progrès de l’Occar et je l’espère, plus généralement, de l’Europe de la défense dans son volet armement.

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