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01 octobre 2018

LA TRANSFORMATION DIGITALE D’UN GRAND GROUPE INDUSTRIEL, L’EXEMPLE DE TOTAL

Quatrième compagnie pétrolière et gazière internationale, Total est aussi un acteur majeur des énergies bas carbone, en particulier le solaire. Fort de près d’un siècle d’histoire, Total découvre, produit, transforme, commercialise et distribue l’énergie sous diverses formes jusqu’au client final. Habitué à traiter des grands flux de données, notamment en géophysique, Total tire concrètement parti des opportunités du numérique et pour cela investit largement dans la formation à la culture digitale de ses collaborateurs, de l’opérateur au COMEX…


  

Digital Subsurface

L’ambition de Total ? Devenir la « Major de l'énergie responsable ».

Comme pour la plupart des grands groupes industriels, la prise de conscience des possibilités offertes par les technologies digitales avec la baisse drastique du coût d’acquisition, de traitement et de stockage des données, ainsi que les possibilités offertes par internet, les applications mobiles, l’open source, etc… a eu lieu entre 2010 et 2015. Après la prise de conscience est venu le temps de l’action avec la mise en place de programmes structurés dans tous les domaines de l’entreprise.

Total ne partait pas de rien, loin de là. Ainsi, le secteur amont de l’entreprise, celui de l’exploration, peut-il être considéré comme « nativement digital ». Les centaines de géophysiciens qui y travaillent sont autant de « data scientists » habitués à traiter des quantités très importantes de données via des algorithmes avancés dont certains sont développés en interne et confèrent un avantage concurrentiel à l’entreprise. Total dispose également d’un des supercalculateurs les plus puissants du monde. Tout ceci constitue un terreau fertile sur lequel la culture digitale a pu prospérer rapidement.

Mais que recouvre cette notion de « digital » ?

Beaucoup de réponses existent, et on peut retenir de manière pragmatique que les projets du digital concernent la valorisation au sens large du patrimoine de données de l’entreprise et l’amélioration ou la simplification de la manière de travailler ou d’interagir avec les clients. Bien évidemment, on ne fait pas du digital pour le plaisir de faire du digital. Les projets doivent être au service de la stratégie de l’entreprise et répondre à des objectifs « business » : améliorer la sécurité industrielle, augmenter la performance opérationnelle, réduire les coûts, améliorer l’expérience de l’employé ou du client, développer de nouvelles activités ou de nouveaux services…

Il est également important d’avoir à l’esprit que la transformation digitale est humaine, culturelle et sociétale autant que technologique. Aborder le digital uniquement par le prisme technologique risque d’être une fausse route. A défaut d’une réflexion approfondie sur l’accompagnement du changement, sur l’impact sur les processus et les organisations, les déploiements purement technologiques risquent de s’avérer décevants. L’investissement en formation, communication, développement de la culture digitale ne doit surtout pas être sous-estimé.

« LE REVERSE MENTORING DES DIRIGEANTS PAR DES JEUNES DIGITAL NATIVES »

Voyons à présent quelques exemples concrets des projets de transformation digitale de l’entreprise.

Commençons par le facteur humain et les programmes de formation ou de développement de la culture digitale.

Le passeport digital pour tous a été mis en place en 2016 et plus de 30,000 collaborateurs l’ont obtenu.

Applications co-développées avec des sites et disponibles dans un “app store” industriel dédié pour opérationnels de terrain de terminaux 

Constitué d’un ensemble de vidéos courtes et d’un quizz, ce passeport permet d’acquérir les notions de base de la culture digitale.

Le « reverse mentoring digital » des dirigeants par des jeunes « digital natives » a été instauré fin 2014 et a rencontré un succès qui ne se dément pas.

Le Comex a décidé de consacrer une semaine par an à une « digital & innovation week » qui les a emmenés successivement depuis 2016 dans la Silicon Valley, en Inde, en Chine et leur a permis de découvrir divers écosystèmes d’innovation avec des retombées business concrètes à chaque voyage.

Une formation spécifique à l’intelligence artificielle (IA) a été créée pour les managers afin qu’ils prennent conscience que l’IA est une réalité concrète déjà omniprésente et qu’ils puissent lancer des programmes de mise en œuvre des technologies de l’IA dans leurs activités respectives.

Le Booster, laboratoire d’innovation digitale, incubateur et accélérateur de projets, a été lancé en 2017 dans un espace de 700 m2 à La Défense et a aussitôt rencontré un très grand succès. Fort de cette dynamique, un autre Booster sera mis en service dans le centre technique et scientifique de Pau fin 2018. D’autres Boosters suivront.

Le Booster catalyse également le développement des relations avec l’écosystème des startups, via par exemple l’incubateur « Usine 4.0 » qui permet à des startups de tester leurs produits et solutions dans des conditions industrielles réelles. Plusieurs startups passées par cet incubateur sont devenues des fournisseurs à part entière de Total. Cet exemple ne constitue que la partie émergée du vaste ensemble des programmes menés par le Groupe avec des startups.

Les outils de travail collaboratif, de travail en mobilité et de partage avec l’externe ont également été largement améliorés. Ainsi, le programme Lift visant à déployer la suite Office 365 de Microsoft a été mis en œuvre en 2018. Office 365 va bien au-delà d’une amélioration de la suite Office bien connue, car Office 365 contient des outils collaboratifs très puissants comme Teams qui permet d’améliorer considérablement le travail en équipe, grâce au partage de documents, à la co-édition en temps réel, aux capacités d’interactions adaptées (chat, appel vidéo, etc…) Adieu les révisions v25, v26 et v26.1 des documents envoyés par mail… Pour le déploiement d’un tel outil et son adoption effective, la dimension « accompagnement du changement » est primordiale.

Passons aux projets industriels, pour lesquels on citera trois exemples.

Deux partenariats majeurs ont été conclus en 2018, l’un avec Tata Consulting Services en Inde pour la création d’un centre d’innovation dédié aux technologies de la raffinerie 4.0, l’autre avec Google pour le développement des techniques d’intelligence artificielle appliquées au traitement d’images sismiques et à l’analyse sémantique de documents du domaine des géosciences. Ce partenariat avec Google est bien illustratif de la vitesse de la transformation digitale : l’idée d’un tel partenariat avec un acteur connu essentiellement pour son moteur de recherche et ses activités orientées grand public aurait été considérée assez peu crédible en 2015.

Toujours dans le domaine industriel, le programme TIM (Total Industrial Mobility) vise à équiper les opérateurs de raffineries ou de plateformes pétrolières de smartphones ou tablettes munies d’applications destinées à faciliter et simplifier leur travail, à améliorer la sécurité, réduire les risques d’erreur. Quarante sites seront équipés en 2018, là encore ce programme rencontre un vif succès du fait de l’implication des utilisateurs dans la phase de conception des applications et d’un effort important d’accompagnement lors des déploiements sur site.

Les technologies de plateformes digitales ont également permis à Total de faire évoluer son modèle de business et d’entrer sur des activités qui paraissaient peu accessibles il y a quelques années : c’est le cas de la vente de gaz et d’électricité aux particuliers. Grâce au rachat de Lampiris en 2016 puis de Direct Energie en 2018, Total est devenu le troisième acteur sur ce marché en France, ce qui permet au Groupe de préparer l’avenir dans un monde de l’énergie où le gaz et l’électricité sont appelés à jouer des rôles de plus en plus importants.En conclusion, la transformation digitale concerne toutes les activités de l’entreprise, opérationnelles ou fonctionnelles, et elle est au service de sa stratégie. Enfin, sa dimension humaine et culturelle doit être traitée avec la plus grande attention pour garantir que les nouveaux outils sont réellement adoptés et utilisés à la pleine mesure de leur potentiel.

 

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