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09 juin 2025

SYNTHÈSE DU DINER-DÉBAT AVEC BRUNO SAINJON
PRÉSIDENT DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’ONERA

Lors de notre second dîner-débat de l’année, nous avons eu le plaisir d’accueillir Bruno Sainjon, PDG de l’ONERA, sur le thème : « Quelle place pour un établissement public de recherche en aéronautique en France, en Europe et dans le monde ? ». 35 camarades ont participé à ce dîner-débat dont 11 « jeunes IA ».


Après une riche carrière avec des postes à la DGA dont le dernier fut directeur des opérations, conseiller économique du ministre de la défense Alain Richard, services du Premier Ministre (Coupe du Monde de football 1998 et SGDN), industrie au sein de SNPE et Celerg comme PDG, Bruno Sainjon est depuis 2014 Président Directeur Général de l’ONERA, établissement public de recherche en aéronautique en France et en Europe ? »

Bruno présente dans un premier temps l’important travail de redressement qu’il a dû entreprendre pour restaurer l’image et la crédibilité de l’ONERA, ainsi que son équilibre économique. En 2014, malgré une réduction importante des dépenses de fonctionnement et d’investissement, le résultat net comptable s'est établi à -16 M€ pour un budget de 210 M€.

Plusieurs chantiers sont engagés visant à faire de l’ONERA une grande maison de verre avec deux compartiments opaques, le confidentiel défense et le confidentiel industrie, à partir de trois documents stratégiques régulièrement mis à jour :

- un Plan Stratégique Scientifique (PSS) publié au printemps 2016 après de très nombreuses interactions avec l’Etat (DGA, DGAC, MESRI, CNES …) et les industriels collectivement (GIFAS) et individuellement (Dassault, Safran, MBDA …).

- un Contrat d’Objectif et de Performances (COP) portant sur les années 2017-2021 et signé en 2016 avec le Ministre de la Défense,

- les Feuilles de route de l’ONERA. Leur première édition est ainsi publiée début 2019 et affiche un renforcement des recherches en faveur de la décarbonation de l’aviation civile.

L'organisation est modifiée, pour s'appuyer sur les atouts de l’ONERA et répondre aux attentes de ses partenaires étatiques et industriels. Cela aboutit au regroupement des activités Ile de France de l’ONERA sur le seul site de Palaiseau, en abandonnant les emprises de Meudon et Chatillon, et à un plan de renforcement des grandes souffleries approuvé en 2018 par le cabinet du Premier ministre.

Enfin, à l’automne 2015, Bruno rencontre les partenaires étatiques et industriels de l’ONERA pour leur présenter le positionnement de l’ONERA : poursuivre la préparation de l’avenir à moyen/long terme, mais également être en mesure de répondre à des demandes urgentes d’expertise au profit de ses partenaires.

Au résultat, les prises de commandes annuelles sont en croissance continue pour atteindre 195 M€ en 2024, grâce à un accroissement significatif des commandes de la DGA et de la DGAC ainsi que des industriels, de clients export et de l’activité souffleries, et le résultat d’exploitation est positif depuis 2015 (9,1 M€ en 2024).

A l'international, Singapour constitue ainsi le principal partenaire dans le domaine de la défense, avec notamment le laboratoire commun SONDRA associant le DSO, équivalent de la DGA, et NUS pour Singapour, Centrale Supelec et l’ONERA pour la France. Ce laboratoire commun œuvre depuis 2004 dans le domaine de l’électromagnétisme et du radar. La coopération a été élargie à d’autres domaines (optique, traitement du signal, quantique…) en 2016. Ainsi, Singapour était en volume d’activités le 3ème partenaire export en 2024.

Le 20ème anniversaire de la coopération avec Singapour (SONDRA)

Avec les États-Unis, deuxième partenaire, la coopération entre l’US Army et l’ONERA dans le domaine des hélicoptères est active depuis 1971. Dans le domaine spatial, la NASA et le JPL reconnaissent la prééminence mondiale des équipes de l’ONERA dans deux domaines : l’optique adaptative et les accéléromètres spatialisés. Enfin, certains constructeurs américains sollicitent l’ONERA pour des essais en soufflerie.

Dans le domaine multilatéral, l’ONERA est membre fondateur de plusieurs associations ou réseaux. La plus ancienne est l’EREA , association européenne regroupant 12 établissements publics de recherche en aéronautique civile créée en 1994. Notons que le prix EREA de la meilleure publication scientifique a été remporté 11 fois en 15 éditions par l’ONERA.

L’ONERA participe également à l’ESRE , association européenne regroupant 9 établissements publics de recherche spatiale créée en 2016 et EDRIN , réseau regroupant 9 établissements publics de recherche dans le domaine de la défense créé en 2021. Ce réseau a permis à l’ONERA de se classer 4ème établissement de recherche en Europe et premier français en nombre de projets retenus au titre du Fonds Européen de Défense entre 2021 et 2023.

Bruno évoque enfin l’IFAR , réseau mondial créé en 2011 regroupant 26 établissements publics de recherche en aéronautique civile dont les plus prestigieux (NASA, JAXA, NRC, DLR …). Signe de la reconnaissance par leurs pairs de l’excellence des travaux des équipes ONERA, Bruno a été élu à l’unanimité vice-président de l’IFAR en 2021 et à sa présidence en 2023 jusqu’à fin 2025.

Enfin, plusieurs travaux remarquables de l’ONERA sont rapidement présentés afin d’illustrer son excellence technologique :

- Tout d’abord, la mise au point d’un gravimètre quantique développé pour les besoins de la Marine française. Ce système fut déclaré opérationnel fin 2024, permettant à la Marine française d’être la première armée au monde équipée opérationnellement d’un système quantique de deuxième génération.

- Puis, la mise en service en 2024 du logiciel SINAPS d’intelligence artificielle d’aide à la décision des contrôleurs aériens, développé en collaboration avec la DSNA . Les 5 centres de contrôle de la DGAC/DSNA qui maillent le territoire métropolitain sont désormais équipés de SINAPS.

- Le logiciel DIAMONDS développé par l’ONERA, élément essentiel du système de lutte anti-drones mis en place à l’occasion des Jeux olympiques 2024 et de la cérémonie de réouverture de Notre Dame.

- Enfin, la station Feelings qui, grâce à la combinaison d’un télescope de 60 cm et d’une optique adaptative permettant de concentrer le faisceau optique et de s'affranchir des turbulences de l'atmosphère, a établi le record du monde de liaison haut débit montante et descendante.

Parmi les réponses aux questions des participants, l’important développement des performances du système de connaissance de la situation spatiale GRAVES est souligné. Ainsi, à l’occasion du traitement des obsolescences, ce système, qui suivait en 2014 en permanence 2000 objets de la taille « d’une machine à laver », est passé à plus de 12 000 objets aujourd’hui de la taille « d’une boîte de chaussures ». Pour mémoire, entièrement conçu et développé par l’ONERA pour un coût total de 20 M€, ce système est opéré depuis 2005 par l’Armée de l’Air et de l’Espace et a permis la mise en place d’un cadre d’échanges privilégiés en ce domaine avec les États-Unis.

Bruno Sainjon insiste sur l’importance de déployer en permanence les efforts suffisants en matière de recherche fondamentale et appliquée afin de pouvoir disposer le moment venu des technologies matures nécessaires au développement de nos futurs programmes, d’autant plus que ces deux premières étapes sont de loin les moins onéreuses.

Mais, il défend également la nécessité d’une recherche bottom-up, en complément à la recherche top-down tirée par le besoin, en citant la contribution de l’ONERA à la pale de l’hélicoptère H160 d’Airbus. En effet, partis d’une feuille blanche, les aérodynamiciens de l’ONERA ont conçu une pale qui divise par 2 le bruit du H160 par rapport à ses devanciers tout en réduisant la consommation.

 

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