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Les puces microfluidiques utilisées au laboratoire de Microfluidique Physique et Bio-ingénierie
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28 mars 2022

MICROFLUIDIQUE ET IMMUNOTHÉRAPIES

Gustave Ronteix a soutenu sa thèse de doctorat le 15/12/2021 sous le titre :

« Inférence des interactions cellule-cellule à partir de l’analyse quantitative d’images de microscopie »

L’interdisciplinarité permet de faire progresser la recherche. Ingénieurs, vous avez une place à prendre dans la santé !


90% des molécules qui commencent leurs essais cliniques échouent à obtenir leur autorisation de mise sur le marché. Les raisons sont nombreuses : manque d’efficacité chez les patients, effets secondaires trop dangereux etc. Une cause est la distance entre la paillasse du laboratoire et le patient. Les chercheurs, pour des raisons pratiques, effectuent le plus souvent leur travail sur des cultures cellulaires en 2D (ici, imaginez les boîtes de Pétri que des scientifiques regardent avec attention dans votre film préféré). Or, la susceptibilité des cellules dans ces conditions artificielles est parfois très différente de ce qu’elle est conditions réelles (i.e. dans le corps du malade), ce qui cause des échecs lors du processus de validation des médicaments.

La microfluidique : une technologie prometteuse

Entre ici la microfluidique. Au début des années 2000, un trio de chercheurs de Harvard et du MIT - Whitesides, Quake et Weitz - développe des techniques pour créer et déplacer des gouttes de quelques milliardièmes de litres (environ mille fois plus petites que des gouttes de pluie). La France s’est imposée comme l’un des pôles mondiaux de l’application de la microfluidique en santé, tant en recherche (laboratoires de Jerome Bibette, Andrew Griffiths ou Jean-Christophe Baret notamment) qu’en industrie (Stilla Technologies, Treefrog Therapeuthics etc.).

Une thèse interdisciplinaire

A l’intersection de ces sujets, ma thèse cherche à allier microfluidique et immunothérapies. Cette nouvelle classe de traitements contre le cancer a connu une explosion depuis une dizaine d’années et la découverte des “checkpoint inhibitors” et le prix Nobel de médecine associé en 2018. L’idée directrice de mon travail est de démontrer que les nouvelles techniques de culture cellulaire employant la microfluidique peuvent être adaptées aux problématiques spécifiques des immunothérapies. Non seulement j’ai pu montrer que cela fonctionne (les cellules immunitaires survivent dans nos puces microfluidiques et tuent les cellules tumorales de façon similaire à ce qui a été rapporté dans la littérature scientifique), mais j’ai aussi prouvé que l’élimination des tumeurs repose sur plusieurs mécanismes coopératifs entre les cellules immunitaires. Chaque expérience dans nos puces permet la prise de milliers d’images qu’il faut ensuite analyser de façon quantitative pour en extraire les paramètres pertinents. Grâce à la qualité des données récoltées et à des modèles mathématiques, j’ai pu décrire dans le détail les mécanismes d’accumulation collective des cellules immunitaires sur les tumeurs.

Cependant, mes travaux ne sont qu’un point de départ pour l’étude de l’activité anti-cancéreuse du système immunitaire. Mon laboratoire a remporté une bourse de recherche hospitalo-universitaire (RHU) afin d’utiliser ce système pour étudier des cellules tumorales de patientes atteintes du cancer du sein et analyser l’impact de plusieurs traitements expérimentaux. 

Le software à l’assaut de la biologie 

Mes travaux illustrent une tendance de fond de,la recherche pharmaceutique : allier hardware, software et biologie pour débloquer des pistes thérapeutiques plus rapidement et à moindre coût. Cette évolution fondée sur la superposition des techniques se fait aussi sentir dans des domaines plus proches des missions de la DGA, et le COVID-19 en est une illustration : en alliant séquençage à très large échelle avec des outils informatiques puissants, les autorités britanniques suivent l’évolution épidémique au jour le jour avec une granularité inimaginable il y a quelques années. Il y a dix ans, l’investisseur Marc Andreessen déclarait que “software is eating the world”, c’est au tour de la biologie de passer à table. 

 

Chaque puce contient 236 gouttes contenant des cellules tumorales et immunitaires.

 

 

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