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01 octobre 2014

VARIATIONS SUR LE SAUVETAGE EN MER

Originale en Europe, déséquilibrée dans son financement, délicate dans l’animation des bénévoles, la SNSM cache de nombreuses questions familières aux IA.


La Société Nationale de Secours en Mer (SNSM) est bien connue, et admirée dans les régions maritimes où ses canots se font applaudir dans les parades navales. C’est une organisation incontournable, reconnue d’utilité publique, qui assure une mission de service public avec sécurité et efficacité.

Un financement privé payé par l’Etat

Le budget de la SNSM, environ 23 M€, est assuré aux trois quarts par des dons et des legs, pour 8 % par l’Etat (dont la part est en décroissance régulière) et pour 16 % par les régions et départements qui abondent les coûts d’investissement issus des dons. Les donateurs bénéficiant de réductions d’impôt (66 % ou 75 %), c’est finalement l’Etat et les collectivités locales qui subventionnent la SNSM à 75 %, mais ce sont les dons qui déterminent le montant total avec un effet de levier d’un facteur 3,5 !

Par ailleurs une partie du fonctionnement est assurée sous forme de prestations en nature (prêts d’installations, plein de gazole, travaux à titre gracieux, don de véhicules…) dont la valeur n’est pas mesurée, mais sans lesquelles l’équilibre financier serait impossible.

Le risque budgétaire est en fait important : le budget est à long terme insuffisant pour assurer le renouvellement de la flotte ; les legs (qu’on voit venir assez longtemps à l’avance, vu la lenteur de règlement des successions) sont en forte diminution ; le financement régional pourrait être interdit si la clause de compétence générale des régions, en voie de suppression, devenait illégale. Le fléchage de fonds européens est bien sûr recherché, à condition toutefois que l’effort pour en obtenir ne soit pas prohibitif en comparaison du résultat. La création d’une sorte d’écotaxe pour les utilisateurs de la mer, qu’ils soient plaisanciers ou exploitants d’éoliennes en mer, n’est pas pour le moment réaliste.

Du nord au sud

L’organisation des secours en mer est très différente selon les pays.

En France, l’alerte et le choix du moyen de secours le mieux adapté est du ressort des CROSS (Centres Régionaux Opérationnels de Surveillance et de Sauvetage). Les canots de sauvetage de la SNSM sont dessinés et construits par des chantiers privés. Ils sont à quai, prêts à appareiller.

En Grande-Bretagne ou en Irlande, la tradition de « Charities » est forte et le financement, exclusivement privé, presque dix fois plus important qu’en France, avec un crédit d’impôt assez faible, de l’ordre de 20 %. Les canots de sauvetage sont conçus et construits par un centre industriel propre. Ils sont pour la plupart mis à l’eau à chaque intervention, par slip, par grue ou sur remorque.

En Espagne, le sauvetage en mer est entièrement étatique, au sein d’une organisation qui comprend aussi l’alerte et les moyens aériens. Avec peu de marnage, et comme en France, les embarcations sont à quai.

De l’est à l’ouest

Il va sans dire que les moyens de sauvetage et les dépenses de la SNSM sont localisés sur les côtes (à l’exception de quelques centres de formation de nageurs - sauveteurs intervenant sur les plages). Les bénévoles habitent également la côte. En revanche les personnes secourues, dans leur immense majorité en cours d’activités de loisirs, proviennent de la France entière, voire d’autres pays. C’est d’ailleurs l’inexpérience d’utilisateurs occasionnels de la mer qui est souvent à l’origine d’interventions de la SNSM (1).

A l’opposé, la motivation des bénévoles vient de leur passé maritime : amoureux de la mer, anciens pêcheurs qui ne veulent pas quitter leur milieu, esthètes de la côte qui lui doivent service… Un effet pervers est une répartition des stations de sauvetage difficile à optimiser. La Bretagne est très bien couverte, et les stations sont très espacées dans les DOM et TOM.

On peut dire qu’il n’est pas plus facile d’animer des bénévoles aux profils et aux motivations diverses que de rechercher des financements loin des côtes.

C’est donc aussi à l’est qu’il faut rechercher des donateurs, et les IA sont bienvenus !

Le renouvellement de la flotte face aux besoins locaux

Personne ne sera surpris d’apprendre que le renouvellement de la flotte pose les habituelles questions de compromis entre refonte et acquisition de nouvelles embarcations, d’évaluation des coûts a priori, de capacité de la SNSM à obtenir les meilleurs prix d’entretien ou de construction, de suivi de chantiers tout au long de leur exécution alors que les spécifications initiales ne peuvent pas être exhaustives.

Le contexte d’utilisateurs bénévoles ajoute du piment aux travaux : d’une part ceux-là demandent souvent une customisation de leurs embarcations qui complique le soutien, d’autre part les donateurs régionaux ne comprendraient pas que leur région (ou leur ville) ne soit pas favorisée dans les choix de fournisseurs, sans compter que les prestations en nature sont toujours assurées localement. Ainsi le centre de réparation de la SNSM, situé à Saint-Malo, se prépare à un déménagement de quelques centaines de mètres vers un nouveau site plus pratique. On comprend pourquoi la SNSM a recruté deux anciens ingénieurs de la DGA pour sa direction technique !

Et enfin, « from cradle to grave », certaines anciennes vedettes de la SNSM commencent une nouvelle vie.

En conclusion, j’observe que comme souvent, des questions qui paraissent petites ressortissent en fait de métiers semblables à ceux d’un ingénieur de l’armement.  

 

220 STATIONS DONT 30 SAISONNIÈRES

Près de 200 canots tout temps et vedettes : en nombre, la SNSM est le premier armateur de France.

Appareillage en moyenne 20 mn après alerte.

4 400 sauveteurs embarqués bénévoles.

7 000 bénévoles avec les nageurs - sauveteurs et les formateurs.

4 000 opérations à la mer.

6 000 personnes secourues, dont 10 % en activités professionnelles de la mer.

Temps moyen d’intervention : moins de 2 heures.%F%

 

 

 

 

Les chantiers se plaignent de l’arrêt de la série de vedettes

 

La Bretagne est très bien couverte 

 

Une vedette de sauvetage par gros temps.

  

 

    
Denis Plane, IGA
Denis Plane, X66 a commencé sa carrière sous le signe du naval en faisant la « Jeanne » et de l’expertise technique à Toulon puis au STCAN. Il est ensuite directeur de programme de missiles et devient directeur du service technique des systèmes navals de la DGA puis du service technique des technologies communes et enfin de la direction des programmes jusqu’en 2003. Il est ensuite nommé contrôleur général des armées en mission extraordinaire jusqu’en 2009. Il est membre de la commission de déontologie et participe à des missions ponctuelles pour la Défense.
 

Auteur

Denis Plane, a commencé sa carrière sous le signe du naval à Toulon puis au STCAN. Passant par les missiles, le service technique des systèmes navals puis le service technique des technologies communes, il dirige la direction des programmes de la DGA jusqu’en 2003. Voir les 29 Voir les autres publications de l’auteur(trice)

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