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L'aiguille du Midi et le Mont-Blanc (avec l'aile du planeur)
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18 février 2025

SCIENTIFIQUE, DANSEUR, PILOTE DE PLANEUR
TROIS DE MES VIES

Publié par Michel BUSQUET (1954) et isaure de broglie | N° 134 - NOS SPORTS

A l'aube de ma 71ème année, je réalise que j'ai vécu plusieurs vies, en voici trois parmi les plus prenantes : les sciences, la danse et le vol en planeur. Chacune m'a offert une forme unique de liberté et de plénitude dans une discipline.


Ma vie de scientifique au CEA, que je ne développerai pas, était liée aux deux autres et, tout autant que celles-ci, elle a été une forme de passion et un engagement.

Ma vie de danseur

Petit, je rêvais de faire de la danse classique, mais mes parents ne m’ont pas autorisé à prendre des cours. Il faut dire qu’à l’époque, la danse « c’était pour les filles ». Alors je me suis rattrapé sur le tard, à 44 ans, je précise tout de même avec un atout essentiel : celui d’avoir, même encore à cet âge, un corps extrêmement souple. Après un démarrage modeste en danse "Modern Jazz", dans un club d’entreprise, j’ai poursuivi pendant un congé sabbatique à Washington, cette fois à haute dose, ce qui m’a permis de monter sur les planches à mon retour en France. Un peu plus tard, à 61 ans, j’ai eu envie de démarrer la danse classique. Comme j’avais appris quelques bases, j’ai pu convaincre la professeur, un peu étonnée pour ne pas dire éberluée … "Tu connais tes positions au moins ? ", vous savez, première, seconde,..., et sixième.

Ce monde de la danse m’a offert une forte connexion à la scène, à mes partenaires et une liberté incroyable dans le registre de l’expression corporelle.

Et cela fait 25 ans déjà que ça dure, même si depuis quelque temps mon corps m’oblige à ralentir …

Le vol en planeur

Tout a commencé en 1988, lorsque, dans les Alpes du Sud, je fais mon premier vol en planeur. Un simple vol en Twin Astir (un biplace) me permet d’effleurer la liberté aérienne, mais ce n’est qu’un prélude. En 1990, après quelques vols d’entraînement, je m’élance, en solo, pour un parcours de 157 km en Maurienne. Ce vol me donne la chance de survoler des montagnes mythiques comme la Meije et le Galibier. C’est une sensation incomparable d'être là, suspendu dans l’air, en harmonie avec les éléments.

Puis, en 1993, je réussis mon plus long vol jusqu’alors : 480 km traversant les Alpes au-dessus des Belledones. Les défis du vol en planeur ne sont pas comparables à ceux de la danse, mais le plaisir ressenti, lui, est tout aussi profond. La gestion des ascendances, ces courants d’air chauds qui permettent au planeur de prendre de l’altitude, confine à un art. Ce n’est pas juste un vol, c’est une quête de fluidité qui demande un effort d’anticipation et un sens de la décision. Un peu comme une danse improvisée sur un air dont on ne connaîtrait que les grandes lignes.

En 1994, un vol au-dessus du Mont Blanc me pousse encore plus loin dans cette aventure. Survoler la vallée de Chamonix, à plus de 4000 mètres, me semble être l’accomplissement d'un rêve.

Mais le vol en planeur n’est pas qu’une simple exploration du ciel, c’est une danse avec le vent, une chorégraphie de l’air que l’on doit apprendre à connaître, à apprivoiser.

Le vol de distance est une forme de performance dans laquelle il faut enchaîner les ascendances sans perdre trop d’altitude, en cherchant toujours les meilleurs courants ascendants. Les moments où l’on est « bas », avec la possibilité d’atterrir dans un champ ou sur un terrain éloigné, rappellent la nécessité d’être vigilant et stratégique, tout comme un danseur qui doit toujours garder en tête l'équilibre entre risque et maîtrise. Je suis assez fier d’avoir obtenu un record homologué : "premier 750 km, départ treuil, sur le territoire", (donc en plaine). Parce qu'en partant de Chambéry et en passant par la Suisse, c'est "trop facile" et j’ai aussi un vol de plus de 850 km à mon actif, mais en montagne c’est une performance presque banale. Le certificat porte le numéro 74, c'est à dire le 74ème 750 km réalisé entièrement en France.

 

dans l'onde (4000 m au-dessus de SISTERON)

Conclusion : Danse et planeur, l'art du mouvement et de l'improvisation.

Des sciences à la scène, puis de la scène à l’azur, ma vie a été une quête de performances, enfin, pas que.

Une particularité propre à la danse et au vol, c’est que cette quête correspond aussi à une recherche d’équilibre dans l’instant présent. Ces deux disciplines m’ont appris à m’écouter, à me dépasser et à trouver la liberté dans la maîtrise.

Et mes trois « carrières » (et d'autres) se sont croisées sans jamais se confondre, chacune enrichissant les autres.

Auteurs

ingénieur-chercheur en physique des plasmas créés par laser
au CEA, Observatoire de Paris, LPGP, NRL, ...
isaure de broglie

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