

CHASSE AUX BARS ET CONCEPTION DE PROJETS
L’INTÉRÊT DU JEU COMPÉTITIF
En conception et en gestion de projet, il faut compléter le rationnel par une intuition fondée sur l’expérience. C’est encore plus vrai pour le sport et l’on peut en tirer des leçons pour la vie professionnelle.
Il s'agit ici de poissons, pas de débits de boissons. En Méditerranée on les appelle “loups”.
La première fois que tu rencontres un banc de bars en chasse sous-marine, tu essaies de tirer le plus gros, mais en général il se planque parmi les autres, et c'est à cela que sert la configuration en banc. Un peu de temps s'écoule et tout d'un coup tu observes que le banc s'éloigne.
Tu essaies de tirer le dernier et tu le rates…
Ne pas viser trop gros, ne pas attendre trop tard
La bonne méthode, c'est de repérer celui qui va bien se placer à ta portée, car tout cela bouge, et de tirer lorsqu'il est en bonne position. Pour repérer un bar qui va bien se placer, il n'y a pas de règle précise et c'est une affaire d'expérience. En chasse sous-marine, tu n’as qu’une seule flèche par plongée et j'en réussissais en moyenne une sur deux, ce qui n'est pas si mal. Il faut également savoir trouver le poisson, et c'est aussi affaire d'expérience.
Choisir ce qui est à portée
Dans la conception d'un projet, ou d'étapes d'un projet évolutif, il y a toujours de multiples options pour le contenu, les coûts et les délais et l'on ne peut en choisir qu'une à la fois. Il faut savoir ne pas viser trop gros, limiter ses ambitions, choisir celle qui a le plus de chances de plaire aux décideurs, et là aussi l'expérience est importante.
Lorsque j'ai utilisé cette métaphore à propos de projets, en général cela déclenchait des rires ou sourires, signe que cela correspondait à une réalité vécue.
Entraîner le « jugé »
Une autre métaphore fondée sur la chasse au-dessus de champs de laminaires denses, dans des fonds rocheux. C'est très rare, mais j'ai rencontré une fois un rassemblement de centaines de gros bars (6/7 kg) camouflés sous les laminaires. Lorsque tu passes au-dessus des laminaires en plongée, il y en a qui sortent de leur cachette et, dès qu'ils ont reconnu le chasseur, ils donnent un grand coup de queue et c'est trop tard : ils sont déjà loin. Là il faut tirer au jugé, comme dans les westerns, et cela non plus ne se rationalise pas. Lors du rassemblement dont je parlais, j'en ai raté des dizaines et j'ai fini par en piquer quatre presque d'affilée ; j'avais manifestement appris vite sans savoir comment.
Et assumer !
Après ce fut difficile de remonter la falaise avec tout ce poids, mais la réussite donne des ailes.
Quand tu as une opportunité exceptionnelle, il faut la saisir tout de suite. Et en général cela donne beaucoup de travail après !
Et d'autres avantages ...
J'ai fumé à mes débuts de chasse sous-marine. Au bout de quelques années j'ai senti mes performances baisser et j'ai compris que c'était lié à la cigarette. Cela m'a motivé pour arrêter et je n'y suis pas arrivé sans trouver une compensation dans le jogging pratiqué régulièrement. Vive le sport !

Yves Desnoës, a mené une double carrière, consacrée pour moitié à l’en-
vironnement marin, notamment au SHOM, dont il a été directeur, et pour moitié aux systèmes d’information. Il a été le fonda- teur du programme SCCOA - Système de commandement et de conduite des opé- rations aériennes dès 1986. Il est membre correspondant du Bureau des longitudes et ancien président de l’Académie de Marine.
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