Aujourd’hui, plus de la moitié de la valeur d’un aéronef moderne, civil ou militaire, vient de la sous-traitance, ce qui illustre combien la réussite collective dépend de la solidité des liens tissés entre acteurs. Dans ce paysage en perpétuelle évolution, le Service Industriel de l’Aéronautique occupe une place singulière. Entité industrielle de l’État, il assure la maintenance, la réparation et la modernisation des aéronefs militaires français, tout en étant un partenaire stratégique de la filière, à la fois client et sous-traitant. Cette double casquette lui confère une vision unique des enjeux de partenariat durable et de compétitivité, moteurs essentiels de la performance aéronautique.

Commander des prestations à des industriels privés est devenu un axe important de notre action. Pour assurer la disponibilité opérationnelle des flottes, le service s’appuie sur des collaborations structurées avec des partenaires de premier plan. Le maintien en condition opérationnelle (MCO) d’équipements de conception THALES sur l’hélicoptère DAUPHIN PANTHER de la Marine Nationale en est une illustration emblématique. Ce partenariat, encadré par une contractualisation précise, des exigences adaptées et un suivi régulier au plus juste, a permis d’augmenter la disponibilité des équipements et donc de la flotte DAUPHIN PANTHER, au profit des Forces au travers de guichets en place sur les bases opérationnelles, tout en garantissant la conformité aux normes les plus exigeantes. De la même façon, la mise en place d’un accord-cadre pour la sous-traitance de chantier de modifications aéronefs (M2000, C130, GAZELLE) sur le site de l’AIA de Clermont-Ferrand a permis de bénéficier des compétences des sous-traitants, d’absorber des pics de charge ponctuels, et ainsi de maintenir nos ressources internes sur le « cœur de métier » de maintenancier aéronautique.

Le SIAé ne se contente toutefois pas de commander : il s’engage dans la durée, veille à instaurer des relations de confiance et favorise la co-construction de solutions avec ses partenaires.

Les mécanismes mis en place pour la contractualisation des prestations auprès des différents sous-traitants – sélection rigoureuse, contractualisation transparente, audits qualité, suivi par indicateurs – garantissent la fiabilité des prestations, mais aussi la pérennité des relations, chaque réussite nourrissant la dynamique collective.

Nous savons aussi inverser les rôles et mettre nos compétences au service des industriels civils et militaires. Notre capacité à intervenir en tant que sous-traitant est reconnue dans la filière : le groupe THALES nous sous-traite le MCO d’une partie des systèmes de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA) notamment grâce à notre expertise dans la maintenance des radars sol installés sur les bases aériennes ou déployés sur théâtres d’opérations. Dans le domaine de l’ingénierie, c’est également nous qui concevons, produisons et réparons les radômes pour les Mirage 2000 et les Rafale. Ces succès reposent sur la mise en place d’une organisation agile et collaborative, partageant ouvertement succès et points d’amélioration avec nos clients.

Un radôme en phase de test à l’AIA de Cuers-Pierrefeu

La sous-traitance, que le SIAé en soit le commanditaire ou l’exécutant, est loin d’être une simple externalisation. Elle est plutôt pour le service un laboratoire d’innovation partagée, où chaque défi est l’occasion de progresser ensemble.

Pour conjuguer performance économique et excellence opérationnelle, nous avons su maintenir au cours des années notre modèle en « compte de commerce », qui nous permet de fonctionner selon des standards proches du secteur privé tout en conservant nos missions de service public. Cette démarche implique une remise en question permanente des processus et une optimisation continue de nos ressources. Cela a par exemple été le cas lors de l’introduction de la fabrication additive dans les ateliers de maintenance, procédé qui permet aujourd’hui des gains significatifs sur les délais de production de pièces de rechange, tout en en maîtrisant les coûts. C’est aussi ce fonctionnement particulier au sein de l’État qui nous permet de challenger nos partenaires et de stimuler l’innovation. Cette dynamique profite ainsi à l’ensemble de la filière, en renforçant l’attractivité et la compétitivité de l’industrie aéronautique française.

La réalité industrielle n’est jamais un long fleuve tranquille. La gestion des défaillances fait partie du quotidien, et le SIAé a su développer une culture de l’accompagnement et de la résilience. Lorsque la fourniture de certaines pièces de rechange subit, par exemple, une rupture d’approvisionnement d’un de nos fournisseurs, le service met tout en œuvre pour trouver rapidement une solution avec son sous-traitant mutuellement bénéfique. Cette capacité à réagir vite, à dialoguer est cultivée et reconnue comme un facteur clé de la solidité de ses partenariats avec les industriels privés. Les outils de gestion de crise, les clauses contractuelles adaptées constituent ainsi pour le service le socle de relations solides, même dans l’adversité. C’est également dans cette optique que le SIAé n’hésite pas à réévaluer ses partenaires, à renégocier les conditions et à activer les clauses contractuelles pour garantir la continuité et la qualité de son action, au service de l’État français.

La sous-traitance n’est pour nous ni une contrainte ni une nécessité économique : c’est un choix stratégique, un moteur d’innovation et un vecteur de compétitivité pour l’ensemble de la filière aéronautique française. En s’appuyant sur des partenariats durables, en cultivant l’esprit de challenge et en misant sur l’innovation, nous contribuons à la vitalité et à la souveraineté industrielle du pays. Les années à venir verront émerger de nouveaux modèles de collaboration, portés par la transformation numérique, l’intelligence artificielle et les exigences environnementales. Nous continuerons d’être un trait d’union entre tradition d’excellence et audace d’innovation, convaincus que la coopération, la transparence et l’engagement collectif sont les clés du succès pour relever les défis futurs. Plus que jamais, la sous-traitance sera synonyme de partenariat, d’innovation et de compétitivité partagée – pour que l’aéronautique française garde toujours une longueur d’avance.

Christian Rognié, ICT, chef de cabinet du directeur du SIAé

Diplômé de l'École Nationale Supérieure de Mécanique et des Microtechniques de Besançon en 2012, il a débuté sa carrière comme expert en management qualité à la DGA, puis a évolué pour occuper successivement les postes d'ingénieur, de chef de cabinet adjoint aux affaires générales, puis de responsable métier. Il a rejoint en août 2024 le SIAé en tant que chef de cabinet du directeur.